mardi, août 27, 2019

[REPORTAGE] CHILI: LA LANGUE ET LA CULTURE MAPUCHE SONT APPRISES DANS LES ÉCOLES

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
UNE ENSEIGNANTE LIT UN LIVRE A DES ENFANTS D'ORIGINE
 MAPUCHE. ILS REPRÉSENTENT 10% DE LA POPULATION 
CHILIENNE (IMAGE D'ILLUSTRATION). 
PHOTO MARTIN BERNETTI
Le peuple mapuches est le principal peuple natif au Chili. Depuis une dizaine d'années, les mapuches ont lancé un fort mouvement de revendication de leur culture. Une fondation a commencé à donner des cours de culture et de langue mapuche aux élèves de primaires à Recoleta dans le Nord de Santiago : une première hors de la région mapuche.
[ Pour écouter, cliquer sur la flèche ]
CHILI: LA LANGUE ET LA CULTURE 
MAPUCHE SONT APPRISES DANS LES ÉCOLES

RFI: RADIO FRANCE INTERNATIONALE  
ÉMISSION «LES VOIX DU MONDE», 
 PAR JUSTINE FONTAINE, 
DIFFUSION MARDI 27 AOÛT 2019
il est 8 heures du matin dans cette école de la commune de Recoleta située à quelques stations de métro du centre de Santiago. Les enfants de première année de primaire sont en cercle au milieu de la salle de classe, et s'échauffent les pieds et les mains en comptant jusqu'à cinq en langue mapuche.

Leur professeure ce matin, Camila Huenchumil, âgée d'une trentaine d'années, vient une fois par semaine, avec son tambour traditionnel, pour faire chanter et jouer les enfants, en mapudungun, la langue du peuple mapuche : « Au Chili, la loi oblige les communes qui comptent plus de 20 % d'élèves d'origine indigène à mettre en place certains cours dans la langue de leur peuple. La commune de Recoleta compte peu d'élèves d'origine mapuche, et pourtant son maire communiste a décidé de mettre en place ces cours dans toutes les écoles municipales. Une première au Chili, hors de la région d'origine des Mapuches, dans le sud du pays. »

Karen Paichil est l'initiatrice et la directrice de ce projet : « L'objectif est que les enfants apprennent des choses sur la culture et sur la langue, mais on ne cherche pas à former des enfants bilingues. Car la réalité de ces enfants n'est pas celle-là. Ils auront peu de possibilités de communiquer dans cette langue et de la pratiquer. Ce que l'on recherche, c'est qu'ils apprennent le respect et des connaissances de base concernant d'autres cultures. »

Ouverture culturelle


Le fait d'apprendre à connaître une autre culture doit permettre aux enfants d'aller au-delà des préjugés sur les mapuches qui restent assez répandus au sein de la société chilienne. Mais cela permet aussi que les enfants puissent mieux s'accepter entre eux, dans une commune où beaucoup d'élèves sont des enfants d'immigrés péruviens, vénézuéliens, et parfois haïtiens.

Camila Huenchumil trouve important que le projet ait lieu dans une école comme celle-ci : « Justement on dit parfois de ces écoles qu'elles sont “interculturelles”, dans le sens où beaucoup d'enfants viennent de différents pays, surtout d'Amérique latine. Donc il n'y a pas seulement des enfants chiliens. Et puis parmi ceux qui sont chiliens, certains sont mapuches, parfois même sans vraiment le savoir. Ce sont des situations très diverses ».

Un peuple durement discriminé


Si certains enfants ne savent pas qu'ils sont d'origine mapuche, c'est parce que ce peuple a longtemps été durement discriminé et réprimé au Chili, au point que certains mapuches, notamment ceux poussés à l'exode vers les grandes villes, ont parfois dans le passé préféré cacher leur identité.

Aujourd'hui, près de la moitié des mapuche vit dans la région de Santiago et non dans le sud du Chili, et il est difficile dans ce contexte pour eux de conserver leurs traditions et leur langue, le mapudungun. Lyana est l'une des élèves qui viennent d'assister au cours ce matin : « Mon papa est mapuche. Il y a très longtemps, il savait parler mapudungun, mais maintenant il a oublié. »

Une volonté d'étendre le projet


560 enfants bénéficient actuellement de ces cours dans les écoles publiques de la commune de Recoleta. Pour l'instant, ce sont ceux uniquement en première année d'école primaire, équivalent au CP. L'idée est d'étendre progressivement cet enseignement aux autres niveaux.

Un projet que soutient, Margaret, dont le fils est actuellement en deuxième année de primaire à Recoleta. Elle est elle-même d'origine mapuche : «J'aurais trouvé ça super qu'il ait pendant toute la durée de l'école primaire des cours de langue mapuche, la langue de nos ancêtres, car elle se perd aujourd'hui. Ça aurait été très enrichissant pour les enfants, pour aider à récupérer notre culture ».


SUR LE MÊME SUJET :