dimanche, mai 07, 2023

AU CHILI, UN PROCESSUS CONSTITUTIONNEL EN BERNE ET DES RÊVES PROGRESSISTES ENVOLÉS

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LE PRÉSIDENT CHILIEN GABRIEL BORIC PREND UN SELFIE
AVEC SES PARTISANS, LE 21 AVRIL À ANTOFAGASTA.
PHOTO PAR RICO RIZZITELLI  AFP 
Au Chili, un processus constitutionnel en berne et des rêves progressistes envolés /  Après l’échec en 2022 du référendum sur une nouvelle Constitution, les Chiliens votent ce dimanche 7 mai pour relancer le processus. Face aux difficultés du quotidien, le scrutin repris en main par la classe politique suscite peu d’engouement.
dans le rafraîchissement automnal qui enveloppe le pays depuis un mois, les Chiliens s’apprêtent à retourner aux urnes ce dimanche 7 mai. L’élection constitue le neuvième scrutin depuis le plébiscite pour le processus constituant, le 25 octobre 2020, visant à réécrire un nouveau texte fondateur (Magna Carta) pour remplacer celui hérité de la dictature de Pinochet. Huit mois après l’échec fracassant de ce projet de nouvelle Constitution (62 % des votants s’étaient prononcés en faveur du non), plus de 15 millions d’inscrits devront élire 50 conseillers constitutionnels parmi 350, disséminés sur cinq listes, dans une élection redevenue obligatoire, sous peine d’amende.

Mais l’élection suscite une relative indifférence.

«Personne ne pense aux véritables enjeux  ni ne pense aux véritables enjeux ni même à la campagne,  soutient Daniel Llancavil, professeur d’histoire, de géographie et d’éducation civique à l’université de Temuco, de passage à Santiago. Il n’y a pas eu d’atmosphère électorale. Des communes entières sont laissées sans information sur ce qui se joue. Les partis sont absents des territoires. Il y a des gens qui ne savent pas que le vote est obligatoire ni quelles sont les listes. Il n’y a pas de communication, en partie à cause de la frustration laissée par le processus précédent.»

Le référendum du 4 septembre se voulait une réponse à l’estadillo social, le très important mouvement de contestation d’octobre 2019. Un an plus tard, les Chiliens avaient voté à 78 % en faveur d’un processus constituant et 155 citoyens-contributeurs – pour la plupart indépendants et issus de mouvements sociaux de gauche – ont élaboré ladite nouvelle Constitution. Après la victoire du non, les partis politiques ont repris la main. Ce deuxième processus se différencie de façon drastique du précédent. Outre une commission paritaire de 24 experts – nommée par le Congrès avec une majorité de juristes – qui a préparé un avant-projet, histoire de border d’éventuels excès, les 50 conseillers chargés de la rédaction du texte fondateur ne seront plus issus du monde indépendant, mais des organisations traditionnelles.

«Le contexte a changé depuis l’estallido social. Les inégalités apparaissaient alors comme l’une des principales préoccupations du pays. Aujourd’hui, les Chiliens sont obnubilés par la violence, qui génère des niveaux élevés d’insécurité, et l’inflation. Comme le discours a changé, la Constitution n’est plus considérée comme un instrument capable d’aider à résoudre les problèmes», déchiffre Sarah Baïz, analyste pour l’institut de sondage Criteria. Croisée au Costanera Center, la tour commerciale qui domine Santiago, Paloma Aymar, assistante sociale à Los Nogales, un des quartiers les plus indigents de la capitale, le dit à sa façon : «Les gens en sont assez de cette question constitutionnelle. En plus, il y a d’autres problèmes quotidiens plus complexes, comme la délinquance ou le pouvoir d’achat en baisse. Nous sortons d’une explosion sociale, d’une pandémie, d’une crise économique, d’un premier processus constituant et maintenant d’un second. L’usure nous guette

Le Chili n’a peut-être jamais été aussi fragmenté : 21 partis politiques siègent au Congrès et certaines coalitions configurées entre 2017 et 2021 menacent d’imploser après le vote de ce dimanche. Tous les partis impliqués sont déjà dans le coup d’après. «Le Conseil constitutionnel sera sans doute en majorité à droite, à cause de nos dissensions au sein de la coalition au pouvoir, mais aussi parce que l’offre de l’opposition est orientée vers la résolution des problèmes à court terme, notamment en matière d’insécurité. Le gouvernement a essayé de se tenir à l’écart du scrutin, mais c’est un peu futile. Tout le monde verra la compétition de dimanche comme le thermomètre électoral du moment», argumente Juan Luis Castro, député du Parti socialiste.

Du reste, Gabriel Boric, intronisé chef de l’Etat en mars 2022, n’échappera pas à une sorte de bilan tant son action semble difficile à lire. Confronté aux réalités quotidiennes, l’ancien leader étudiant de 2011 semble gouverner à la godille. Il a poursuivi la ligne répressive du gouvernement Piñera. Il s’est employé à militariser la frontière du nord du pays et des territoires mapuches de Wallmapu, dans le sud, tout en accordant en décembre l’amnistie à certains manifestants emprisonnés après la révolte sociale d’octobre 2019, comme pour envoyer des signaux à son camp. Quelques mois après l’échec du référendum du 4 septembre, il avait remanié une première fois son gouvernement afin de donner des gages aux marchés et à la droite, avant les négociations pour le nouveau processus constituant.

Le natif de Punta Arenas doit aussi composer avec une récession économique et une inflation due pour l’essentiel à des facteurs extérieurs. La composition hétéroclite de son cabinet l’oblige surtout à essayer de contenter tout le monde. Descendre la durée du temps de travail à 40 heures hebdomadaires mais aussi ferrailler avec le président péruvien à cause des migrants qui souhaitent traverser la frontière dans les deux sens. Un genre de grand écart difficile à tenir sur le long terme.

Dans les urnes, cinq options s’offrent donc aux Chiliens ce dimanche 7 mai, dont l’alliance chère au cœur du président en place, Unidad para Chile, qui réunit le Parti communiste, le Frente Amplio, le Parti socialiste et le FRVS (organisation écologiste). Histoire d’ajouter à la confusion ambiante, une seconde liste, Todo por Chile, comprend deux autres partis de gouvernement (le Parti pour la démocratie et le Parti radical) ainsi qu’un troisième qui n’a pas son rond de serviette au palais présidentiel de la Moneda, la Démocratie-chrétienne. Les conseillers du chef de l’Etat chilien observeront la place occupée par la première et le score cumulé des deux attelages, entendu qu’il leur faudra atteindre 21 conseillers minimum pour disposer d’un droit de veto parmi le concile appelé à écrire la nouvelle Magna Carta.

De l’autre côté du spectre, après un an de gouvernement Boric, l’heure pourrait être également à la recomposition. La droite traditionnelle, regroupée sous la bannière de Chile Seguro, se fait tailler des croupières par deux forces centrifuges, plus en phase avec le climat actuel du pays andin. Le Parti républicain de l’ex-candidat d’extrême droite à la présidentielle, José Antonio Kast, et une force politique marginale jusque-là qui prend de l’ampleur depuis deux ans, El Partido de la gente (PDG). Cette formation a «réussi à se constituer une base, composée pour l’essentiel de comptes Twitter et d’influenceurs, et s’est approprié un discours que le Frente Amplio assumait jusqu’alors : anti-parti, anti-élite, anti-privilèges. Le PDG parvient à représenter l’électorat qui ne s’était pas mobilisé pendant toutes ces années. Il est en phase avec un profil qui ne croit pas beaucoup aux solutions étatiques, mais plutôt à l’esprit d’entreprise. C’est une nouvelle droite», explique Sarah Baïz.

Même si l’ambiance générale semble présager d’une large victoire de la droite, dure, classique ou populiste, dimanche, la proposition de nouvelle Constitution restera quand même à valider en décembre lors d’un référendum. A voir combien les Chiliens sont versatiles depuis trois ans et demi, pas sûr que le texte soit approuvé. Certains à la Moneda planchent déjà, semble-t-il, sur ce scénario.

Au Chili, un processus constitutionnel en berne et des rêves progressistes envolés.

Après l’échec en 2022 du référendum sur une nouvelle Constitution, les Chiliens votent ce dimanche 7 mai pour relancer le processus. Face aux difficultés du quotidien, le scrutin repris en main par la classe politique suscite peu d’engouement.


CHILI PROPAGANDE ÉLECTORALE 
CANDIDATS COMMUNISTES AUX CONSEILLERS CONSTITUTIONNELS 2023
 
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Le dimanche 7 mai 2023 aura lieu l'élection de 50 citoyens et
citoyens qui discuteront et approuveront une proposition 
de texte pour une nouvelle constitution
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