L’Eglise catholique fait des miracles. Après trente-six jours de grève, l’ensemble des 28 000 travailleurs sous-traitants de l’entreprise publique chilienne Codelco devraient reprendre le travail aujourd’hui ( Libération du 24 juillet). Alors que les négociations étaient dans l’impasse, l’évêque Alejandro Goic a réussi l’impossible: réunir le dirigeant de la Confédération des travailleurs du cuivre (CTC) et le premier producteur de cuivre au monde autour d’un accord. Les grévistes ont voté hier soir en faveur de ce compromis, qui prévoit une prime de production annuelle de 630 euros, un dédommagement pour les jours non travaillés et l’annulation des centaines de licenciements pour faits de grève.
Inflexible. La semaine dernière, la CTC, qui réprésenterait 13 000 travailleurs, avait pourtant refusé un accord. Face à l’inflexible Jose Pablo Arellano, le président de Codelco, soutenu par le ministre des Finances puis par la présidente Michelle Bachelet elle-même, la violence des manifestations est alors montée d’un cran. Au cours de batailles rangées contre les forces de police, des dizaines de travailleurs sont blessés. Huit grévistes entament une grève de la faim. Jeudi, les travailleurs de la mine El Teniente, appartenant à Codelco, la plus grande mine de cuivre souterraine du monde, décident à leur tour d’arrêter le travail pendant quatre jours. En tout, la première entreprise du pays aurait perdu plus de 90 millions de dollars.
«Les montants ne sont pas ceux auxquels nous aspirions, reconnaît Cristian Cuevas. Mais nous continuerons à négocier.» Et le syndicat des travailleurs du cuivre a de toute façon gagné une bataille : «La loi sur la sous-traitance est entrée dans le débat public», note Cristian Cuevas, le dirigeant de la CTC.
C’était en effet une revendication des grévistes et l’espoir des parlementaires chiliens qui les soutenaient. Cette loi, entrée en application en janvier, impose à l’entreprise d’embaucher tout sous-traitant ou contractuel qui travaille à un poste permanent. Or, à Codelco, les sous-traitants qui gagnent jusqu’à trois fois moins que leurs collègues de Codelco pour le même travail au même poste ne sont pas rares.
Contagion. «Notre objectif, ce sont les entreprises privées du cuivre, puis les autres secteurs du pays», a souligné Cuevas dans une interview à Radio Cooperativa. La phrase n’est sans doute pas passée inaperçue auprès du patronat, qui craint la contagion à d’autres pans de l’économie. Quant à la présidente Bachelet, elle se retrouve avec un gouvernement divisé entre défenseurs et opposants aux revendications des sous-traitants de Codelco. Un gouvernement critiqué pour son inefficacité dans ce conflit par la droite et au sein de sa propre coalition.