mercredi, novembre 08, 2006

CRÉATION D'UN LABORATOIRE FRANCO-CHILIEN POUR ÉTUDIER LES SÉISMES DE SUBDUCTION


100 ans après le séisme de Valparaiso, le CNRS-INSU, l'Institut de physique du globe de Paris, l'Ecole normale supérieure et l'Université du Chili s'associent pour créer le laboratoire Montessus de Ballore. Célébrant la mémoire de l'ingénieur français qui installa le premier réseau sismologique du Chili, ce laboratoire verra le jour à l'occasion d'un colloque franco-chilien sur la recherche dans le domaine des séismes de subduction, organisé à Santiago du 6 au 8 novembre 2006.

En 1906, trois grands séismes secouent la côte pacifique américaine, le 31 janvier en Colombie et en Equateur, le 18 avril à San Francisco et le 16 août à Valparaíso. Dans les trois cas, les villes sont détruites, faisant beaucoup de victimes. Le Chili, l'un des pays les plus sismiques au monde, décide alors de confier au polytechnicien français, Fernand de Montessus de Ballore, l'installation d'un réseau de stations sismologiques.

Régulièrement modernisé, le réseau sismologique de Montessus de Ballore fonctionne toujours aujourd'hui. Depuis sa création, le Chili est resté en relation étroite avec la France et l'Europe dans le domaine de la sismologie. Pour preuve, les sismologues français et chiliens organisent conjointement, du 6 au 8 novembre 2006, un colloque pour les 100 ans du séisme de Valparaiso et à la mémoire de Montessus de Ballore. Il portera sur les dernières avancées en matière de compréhension et de prédiction des tremblements de terre de subduction, liées essentiellement à des mesures de plus en plus précises de la déformation de la croûte terrestre. Les séismes de subduction se produisent lorsqu'une plaque (en général océanique) glisse sous une plaque adjacente. Les zones de subduction concentrent l'essentiel de l'activité sismique de la planète (90 %, dont 80 % autour du Pacifique) et produisent les séismes de très forte magnitude. On connaît historiquement des séismes qui ont atteint des magnitudes supérieures à 9 (deux au siècle dernier au large du Chili et de l'Alaska et déjà un en ce début de siècle au large de Sumatra).

Le Laboratoire international associé (LIA) « Montessus de Ballore » (CNRS-INSU/IPGP/ENS/Université du Chili) sera officiellement crée à l'occasion du colloque. Il est constitué des équipes de l'Institut de physique du globe de Paris(1), du Laboratoire de géologie de l'Ecole normale supérieure(2), des départements de géophysique et de géologie de l'Université du Chili.

Les objectifs du nouveau laboratoire franco-chilien sont :

- l'observation et la modélisation des processus associés à la genèse et à la dynamique des tremblements de terre de subduction ;


- la prédiction et la prévention du risque associé aux grandes zones de subduction ;


- la détection des tremblements de terre susceptibles de générer des tsunamis ;


- la compréhension du fonctionnement de ces grandes zones de subduction.


Le laboratoire se focalisera sur les régions qui ont déjà fait l'objet d'un effort continu d'instrumentation de la part des équipes franco-chiliennes : la région Nord-Chili, avec la lacune(3) de Tarapacá ; la région Central-Chili, avec les lacunes de Coquimbo au Nord et de Constitución-Concepción au Sud, et entre les deux, la région métropolitaine de Santiago. Ces régions, proches de la rupture (où un tremblement de terre de subduction est susceptible de se produire), ont été identifiées comme telles depuis une dizaine d'année. Les chercheurs espèrent ainsi observer un grand tremblement de terre de subduction, afin d'en étudier sa préparation et sa relaxation.

LA COLLABORATION FRANCO-CHILIENNE

Sur les traces de Montessus de Ballore, les équipes françaises(4) ont une longue histoire de collaboration scientifique avec les équipes chiliennes des départements de géophysique et de géologie de l'Université du Chili. Depuis plus de 15 ans, elles ont réalisé ensembles des campagnes de terrain en sismologie, géodésie et tectonique. En particulier, elles ont installé deux stations sismologiques du réseau GEOSCOPE et des réseaux permanents de stations GPS.

Après divers soutiens aux recherches franco-chiliennes(5), un programme de l'Agence nationale pour la recherche est en cours pour étudier la genèse d'un grand séisme de subduction. En outre, le GeoForschungsZentrum allemand et le CNRS-INSU ont récemment collaboré pour installer un réseau permanent de stations large-bande et GPS télémétrées(6) au Nord Chili.

Cette longue collaboration franco-chilienne a porté ses fruits : les chercheurs ont détecté des déformations pré-, co- et post-sismiques au sol avant et après les séismes d'Antofagasta (Chili, juillet 1995) et d'Arequipa (Pérou, janvier 2001), ont analysé le séisme de Punitaqui (Chili, octobre 1997) et les essaims(7) sismiques de la lacune de Coquimbo. A la suite du séisme de Tarapacá (2005) dans la lacune du Nord Chili, localisé sous le réseau GPS permanent installé par l'IPGP, l'IRD et l'Université du Chili, le déploiement d'un réseau sismologique temporaire, lors d'une rapide intervention post-sismique a permis pour la première fois de contraindre le mécanisme de ce séisme intraplaques et d'enregistrer encore aujourd'hui une activité sismique soutenue.


Notes :
1) Laboratoire commun CNRS/IPGP/universités Paris VI er VII/Université de la Réunion

2) Laboratoire commun CNRS/ENS

3) une lacune est une zone dans laquelle il n'y a pas eu de grand tremblement de terre depuis longtemps

4) soutenues par le CNRS-INSU, le ministère des Affaires étrangères et la Comisión Nacional de Investigación Científica y Tecnológica au Chili,

5) programme ECOS-Sud de l'Union européenne ; programme Lithoscope puis Dynamique et evolution de la terre interne (DyETI) du CNRS-INSU ; Programme international de coopération scientifique (PICS) et de l'action concertée initiative Prévention des catastrophes naturelles (CATNAT) du CNRS et Programme CONICYT pour la partie chilienne.

6) (où les données sont transmises par sattelite)

7) un essaim est une activité sismique qui procède par bouffées