lundi, juillet 05, 2021

CHILI : UNE FEMME MAPUCHE À LA TÊTE DE LA CONSTITUANTE

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ELISA LONCON.
PHOTO CÉSAR CORTÉS.
Portrait L’élue mapuche Elisa Loncon a été désignée dimanche 4 juillet présidente de l’assemblée chargée de rédiger la nouvelle Constitution du Chili. Cet événement historique, dans un pays où les autochtones ont longtemps été méprisés, témoigne de la volonté de transformation des membres de la Constituante.

 par Gilles Biassette

Dimanche 4 juillet 2021, c’est une femme en tenue traditionnelle mapuche qui a pris la parole lors de la séance inaugurale de l’Assemblée constituante à Santiago. Brandissant le drapeau de son peuple, Elisa Loncon, 58 ans, a d’abord salué, en espagnol et en mapudungun, sa langue maternelle, les peuples du Chili, depuis l’Atacama jusqu’à la Patagonie.

Avant de lancer, sous les acclamations de la majorité des membres de l’assemblée : « Cette Constituante va transformer le Chili en un Chili plurinational, interculturel, qui protège la Terre Mère ! »

Des images inédites au Chili

Dans un pays où les peuples autochtones ont longtemps été méprisés, où les langues indigènes sont marginalisées, ces images diffusées par la télévision chilienne ont aussitôt pris une dimension historique. En octobre 2019, alors que le Chili descendait en masse dans la rue pour dénoncer le système social et économique hérité de la dictature, et peu amendé depuis le retour de la démocratie, le drapeau mapuche, principale ethnie autochtone, accompagnait les manifestants en signe de protestation. Désormais, il est à la tribune de l’assemblée élue pour réfléchir à l’avenir de la nation sud-américaine.

Le choix d’Elisa Loncon pour présider cette assemblée en dit long sur la volonté de la majorité de ses membres de transformer le pays en profondeur. Cette linguiste reconnue de l’université de Santiago du Chili, qui occupe l’un des 17 sièges réservés aux peuples originaires, a obtenu 96 voix sur les 155 de l’assemblée lors du second tour du scrutin. Elle a reçu le soutien des élus autochtones (17), d’une majorité des indépendants (48), de la coalition de gauche Apruebo Dignidad, réunie autour du Parti communiste (28), ainsi que de représentants de la liste de centre gauche (25).

Des symboles, en préambule à un exercice complexe
Le ton était donné dès cette séance inaugurale, quand la présidente a demandé une minute de silence, « pour les morts des cinq cents années », en référence aux siècles écoulés depuis l’arrivée des conquistadors en Amérique.

Mais passée l’heure des symboles, le plus dur commence désormais pour Elisa Loncon et ses collègues. Cette assemblée a neuf mois devant elle, plus éventuellement trois autres mois, pour rédiger une nouvelle Constitution. Un temps très court, d’autant que les procédures restent encore à définir. Seule certitude : les dispositions doivent être prises à la majorité des deux-tiers. À l’issue de ces travaux, le texte devra encore être approuvé par référendum.