vendredi, novembre 14, 2025

CHILI. JOSÉ ANTONIO K4ST, CE FILS DE NAZI ET ADMIRATEUR DE PINOCHET QUI VEUT DEVENIR PRÉSIDENT

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DESSIN DE RAINER HACHFELD

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Charlie
 Hebdo
International / Amériques / Chili. José Antonio Kast, ce fils de nazi et admirateur de Pinochet qui veut devenir président / Souriant comme un vendeur de bibles José Antonio Kast est aussi fils de nazi, fan de Pinochet et ultraconservateur. Pour autant, rien de tout cela n'empêche le candidat chilien d'extrême droite d'être en lice pour devenir le 40ème président de son pays. Et pas même ses promesses d'expulser les migrants, de sabrer les dépenses de l'État et de repeindre la démocratie à la chaux de l'ordre moral.

par Étienne Le Page  5 min. de lecture Publié le 13 12 novembre 2025 à 21h37

JOSÉ ANTONIO K4ST LORS D’UN DÉBAT
 PRÉSIDENTIEL  D’ENTRE-DEUX-TOURS,
 À SANTIAGO, LE 10 DÉCEMBRE 2021.
PHOTO MARTIN BERNETTI

Sur les plateaux télé, José Antonio Kast sait sourire. Dans les débats, il use d’une voix douce et placide pour contredire ses opposants. Quand il détaille son programme, face caméra, il est bien peigné et systématiquement vêtu d’un sérieux blazer bleu marine. Pas méchant pour un sou. Il a parfois même l’air un peu benêt. Mais sous ses belles coutures, l’admirateur assumé de Pinochet, fils de nazi, est résolument d’extrême droite. Dimanche, ou lors d’un potentiel second tour en décembre prochain, José Antonio Kast pourrait devenir le 40ème président du Chili.

Chili / élection présidentielle le 16 novembre 2025

FACSIMIL D'UN BULLETIN DE VOTE
FLYER JANNETTE JARA

► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR

Car ce week-end, les citoyens chiliens sont appelés à voter pour le premier tour des élections présidentielles. En tête des sondages caracolent Jeannette Jara, candidate issue de la gauche communiste et proche de l’actuel président Gabriel Boric, et deux figures de l’extrême droite, Johannes Kaiser et José Antonio Kast. Ce dernier, père de neuf enfants et ancien avocat de 59 ans, brigue pour la troisième fois consécutive le mandat présidentiel. Depuis 2017, l’homme politique avance à pas de velours, derrière un masque de gendre idéal. Dans le fond, le millionnaire a pourtant tout à voir avec ses pairs : Milei et sa tronçonneuse, Trump et ses charters de migrants, Bukele et ses mégas prisons.

LE CANDIDAT CONSERVATEUR À LA PRÉSIDENTIELLE CHILIENNE
JOSÉ ANTONIO KAST,  DU PARTI RÉPUBLICAIN, LORS DU LANCEMENT
DE SA CAMPAGNE À TEMUCO, AU CHILI, LE 25 SEPTEMBRE 2025. 
PHOTO JUAN GONZALEZ

Au commencement, Pinochet

Aux origines de la vision politique de José Antonio Kast, il y a Pinochet. À la faculté de droit, le jeune étudiant est un disciple de Jaime Guzman, tête pensante du dictateur. « S’il était vivant, il voterait pour moi », résumait-il, bien des années plus tard. Pour l’ancien député, « abstraction » faite des droits de l’homme, le régime de Pinochet « a plus fait pour le développement du pays que celui de Sebastián Piñera [président conservateur du Chili de 2010 à 2014, ndlr] ». Vingt-sept ans de démocratie. C’est le temps qu’il aura fallu attendre pour voir un politicien assumer publiquement cet héritage. Au Chili, la dictature militaire pinochetiste, instaurée entre 1973 et 1990, s’est fait une spécialité de la torture et l’exécution des opposants politiques. Le bilan de ces 17 années de dictature, établi patiemment par de nombreux acteurs au fil des ans, fait état de 30 000 prisonniers politiques et 3 065 morts et disparitions.

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Qu’importe : pour l’ultralibéral qu’est Kast, Pinochet reste un exemple sur de nombreux points. Économiquement, le multimillionnaire entend imiter, s’il est élu, les mesures du dictateur, basées sur les préceptes de l’École de Chicago. Comprenez : une déréglementation massive de l’économie, une réduction drastique du rôle de l’État et des privatisations en cascade. De quoi rappeler la tronçonneuse et les coupes budgétaires du président Javier Milei. La politique de l’Argentin, qui avait effectivement réduit une inflation astronomique, a néanmoins engendré une baisse de la consommation et des salaires ainsi qu’une hausse du chômage dans le pays. S‘il devient président, Kast a promis d’imiter son modèle en économisant « 6 milliards de dollars en dix-huit mois », sur le dos de l’État.

Fini les bêtises

Mais revenons en arrière. Avant de se rêver président, José Antonio Kast a suivi le parcours classique. Sur les bancs de l’Assemblée, l’édile effectue trois mandats au sein du parti conservateur chilien : l’Union des démocrates indépendants (UDI). À l’étroit, plein d’ambition, il quitte le parti et se présente dès 2017 à la présidentielle, sans structure derrière lui. Il termine au pied du podium, cumulant 7,9 % des suffrages. José Antonio Kast se voit obliger de fonder sa propre organisation politique : le Parti républicain. La quête du pouvoir continue. Et les outrages pleuvent. Lors de sa seconde campagne, le candidat multiplie les sorties polémiques. À l’époque, il exprime dans son programme sa volonté d’interdire « l’avortement en toutes circonstances », « promouvoir la religion dans les écoles », et même « autoriser le port d’armes aux civils » pour lutter contre l’insécurité.

Un passé qu’il tente de gommer, dans sa dernière campagne. José Antonio Kast semble s’être adouci. Terminé les frasques machistes, et les promesses d’abrogation de la loi sur l’avortement. Révolu, le temps où ce fervent catholique réprouvait publiquement le mariage gay. Place au nouveau Kast, focalisé sur les immigrés et la sécurité. Les thèmes changent, la méthode reste. Tranchées et murs aux frontières, prisons de haute sécurité, armée dans les rues : tout indique que José Antonio Kast a mûri son projet. Aujourd’hui, il espère expulser « tous les migrants » de son pays. Pas moins des 330 000 personnes, donc, et beaucoup d’enfants. Au Chili, où le crime organisé est, entre autres, importé par des cartels vénézuéliens, ce « plan implacable » qu’il veut mettre en place séduit. À quelques jours du premier tour, le sourire Colgate de Kast est crédité de 20 % des voix.

Reste à savoir si les Chiliens passeront à ce fils d’officier nazi et frère d’un ancien ministre de Pinochet cette lourde filiation. Il ne faut pas, après tout, prêter au fils les idées du père. Un père, Michael, comme l’a révélé le journaliste et chercheur Mauricio Weibel, qui était bel et bien titulaire d’une carte de membre du Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP), le parti nazi. Fuyant l’Allemagne, la famille bavaroise s’installe dans la banlieue de Santiago et fait fortune dans la production de saucisses. Près de 70 ans après, José Antonio Kast garde une affection certaine pour les traditions familiales. Lors de sa première campagne, il affirmait dans un débat télévisé : « Je crois en des choses simples : en Dieu, la famille et la patrie ? » Rassurons-nous, José Antonio Kast n’est pas un nostalgique de Hitler, mais plutôt du maréchal Pétain.

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Con un VOTE POR JARA y la presentación de Alvaro Hernirquez y PETTINELLI


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jeudi, novembre 13, 2025

LA GAUCHE UNIE FACE À L’EXTRÊME DROITE

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 « LA GAUCHE UNIE FACE À L’EXTRÊME DROITE»
UNE DE L'HUMANITÉ
DU 13 11 2025

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Élections présidentielles au Chili : Jeannette Jara, la candidate communiste qui porte l’espoir d’une gauche unie face à l’extrême droite / À la veille du premier tour d’une présidentielle décisive pour le pays, ce dimanche 16 novembre, Jeannette Jara, candidate communiste à la tête d’une large coalition progressiste, incarne une gauche populaire face au risque d’un retour de l’extrême droite.

Luis Reygada Publié le 13 novembre 2025 8 min

Conchali, banlieue nord de Santiago du Chili (Chili), correspondance particulière.

LUIS ALBERTO REYGADA
JOURNALISTE À L'HUMANITÉ 

À deux semaines du premier tour de l’élection présidentielle du 16 novembre au Chili, la candidate communiste Jeannette Jara (au centre) incarne une gauche unie face à la montée de l’extrême droite dans le pays.


«¡Es oficial! Somos el número 2 en la papeleta2️⃣✌️»
FLYER JANNETTE JARA

► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR

Des baraquements à perte de vue, une autoroute, quelques chiens errants et un chemin rocailleux. Depuis l’entrée de la maison où a grandi celle qui aspire à devenir la prochaine présidente du Chili, Jeannette Jara, il n’est pas difficile de mesurer l’ampleur du défi. Construit à la hâte dans les années 1960 pour loger des ouvriers, le quartier d’El Cortijo, pauvre et poussiéreux, n’a a priori pas beaucoup changé.

À peine quelques kilomètres séparent la commune de Conchali, au nord de Santiago, du palais de la Moneda. Mais, dans un pays marqué par de profondes inégalités, ces deux mondes semblent à des années-lumière l’un de l’autre.

L’itinéraire d’une militante communiste issue des quartiers populaires

« Ici, tout le monde l’appelle encore Jenny », lance Miriam Peña. Voix rauque de grande fumeuse, casquette à l’effigie du chanteur cubain Silvio Rodriguez, tenue décontractée et banane en bandoulière : la cinquantaine, elle a le même âge que Jeannette Jara.

Elles ont grandi ensemble, ici, et Miriam a dirigé sa campagne quand la communiste s’est portée candidate à la mairie de Conchali. À deux semaines du premier tour de la présidentielle, la Cortijeña de naissance fait toujours partie de l’équipe.

À DEUX SEMAINES DU PREMIER TOUR DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
DU 16 NOVEMBRE AU CHILI, LA CANDIDATE COMMUNISTE JEANNETTE JARA
(AU CENTRE) INCARNE UNE GAUCHE UNIE FACE À LA MONTÉE DE L’EXTRÊME DROITE DANS LE PAYS.
PHOTO ESTEBAN FELIX

« C’était une fille du quartier qui est devenue sous-secrétaire, puis ministre, et aujourd’hui elle se présente à la présidence », s’émerveille Miriam Peña. « Partir d’une tente, construire ta baraque, et voir que de là peut sortir un tel succès… franchement, c’est impressionnant. »

Militante du Parti communiste chilien (PCCh), issue des classes populaires, candidate d’une gauche unie : Jeannette Jara est déjà entrée dans l’histoire. Face à une droite qui durcit le ton pour séduire les électeurs, elle met en avant ses origines modestes et modère son programme pour rallier au-delà de la large coalition de neuf partis qu’elle représente, du Parti communiste chilien (PCCh) aux démocrates-chrétiens.

Une coalition de gauche face à la droite radicale

« Elle tente de remporter les élections non pas au nom du PCCh, mais au nom d’une coalition de centre gauche, analyse Claudia Heiss, professeure en sciences politiques à l’université du Chili. C’est pourquoi elle a adopté une position beaucoup plus axée sur l’État que sur son parti. »

Avec 27 % d’intentions de vote au dernier sondage, Jara devance les huit candidats qui s’affronteront lors du premier tour, ce 16 novembre. Mais de peu. La population chilienne a été largement déçue par le président sortant, Gabriel Boric (Frente Amplio, coalition de gauche), incapable de mettre en place sa politique de transformation.

Face à elle, ce dimanche, ses principaux rivaux sont une candidate de centre droit, Evelyn Matthei, et deux d’extrême droite, qui ne manquent pas de séduire les foules : Johannes Kaiser et José Antonio Kast (qui s’était incliné face à Boric en 2022). Si aucun des candidats ne dépasse les 50 % lors du premier tour, un second aura lieu le 14 décembre – un scénario qui s’annonce défavorable pour Jara.

À quelques pas de Conchali, dans la banlieue populaire de Quilicura, une équipe de campagne en faveur de Jara distribue des tracts sur un marché. Sur le trottoir d’en face, des partisans du candidat Johannes Kaiser agitent des drapeaux. Des automobilistes klaxonnent en signe de soutien. « Il dispute le vote populaire à notre candidate », explique Mirza Sandoval, militante du PCCh.

Un programme austéritaire radical à la Javier Milei

Populiste et démagogue à la manière de l’Argentin Javier Milei, Kaiser monte dans les sondages en promettant une cure d’austérité radicale : réduire de 25 à 9 le nombre de ministères, supprimer 200 000 emplois publics et privatiser des entreprises nationales. Selon les dernières estimations, il serait au coude-à-coude avec Evelyn Matthei, avec quelque 15 % d’intentions de vote, et pourrait même rattraper José Antonio Kast (20 %), fils d’un immigré nazi ayant combattu au sein de la Wehrmacht.

Sur les tracts des militants de gauche, le programme a une tout autre saveur : instauration d’un « revenu vital » minimum assuré de 750 000 pesos (687 euros), programme de logements sociaux, mais aussi plus de moyens pour la sécurité publique et la lutte contre le narcotrafic.

« L’idée est de faire connaître les propositions de la camarade Jeannette et d’échanger quelques mots avec les gens d’ici, qui sont nombreux à voter pour la droite », explique Mirza Sandoval, un drapeau Jara dans une main, des tracts dans l’autre.

D’autres promesses ont disparu du programme de la coalition : la nationalisation du lithium, défendue par le PCCh, a cédé la place à un discours centré sur la sécurité, le contrôle des frontières et l’usage de drones contre le crime organisé. Imposées par la droite et relayées par nombre de médias, les questions tournant autour de l’insécurité ont été placées au cœur de la campagne.

Les acquis sociaux récents ont été portés par la gauche au pouvoir

Marcos Barraza, membre du PCCh et candidat aux législatives, perçu comme le bras droit de Jara, participe au tractage. Cet ancien ministre du Développement social (sous le second mandat de Michelle Bachelet) insiste sur la nécessité de « placer les inégalités et les vulnérabilités au centre des priorités » et de poursuivre, avec la gauche au pouvoir, « la voie de la transformation ».

Tout en mettant en avant les acquis de la gauche ces dernières années, et notamment grâce à la présence – jusqu’à avril dernier – de Jeannette Jara à la tête du ministère du Travail : hausse du salaire minimum, baisse du temps de travail de 45 à 40 heures hebdomadaires, instauration d’un nouveau système de retraite plus bénéfique aux travailleurs.

Pour le Parti communiste – longtemps exclu des coalitions de centre gauche et bien plus radical dans ses positions vis-à-vis de nombreux sujets abordés dans la campagne –, la candidature de Jara représente « un défi », admet son président, Lautaro Carmona. « Mais nous comprenons parfaitement la situation et elle dispose de l’autonomie et de l’indépendance nécessaire pour agir politiquement en accord avec la mission qui lui a été confiée », ajoute-t-il (lire notre entretien en page 4).

« Il y a beaucoup d’inquiétude quant à la suite de cette expérience », observe Claudia Heiss. En interne, le débat s’ouvre : le PCCh est-il un parti révolutionnaire ou de gouvernement ?

Alors qu’il traverse depuis 2013 un processus de renouvellement générationnel, porté par de jeunes militants issus des luttes étudiantes et marqués par les inégalités d’un système néolibéralisme hérité de Pinochet, le PCCh présente 28 candidats – dont une grande partie a moins de 40 ans – aux législatives qui se tiendront en même temps que l’élection présidentielle.

Lutter contre l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir

« Les gens ont appris à mieux nous connaître. Aujourd’hui, les communistes bénéficient du soutien de nombreux progressistes, mais aussi de personnes sans appartenance politique claire, qui croient aux droits sociaux », assure Iraci Hassler, ex-mairesse communiste de Santiago (2021-2024). Les gens ne soutiennent pas Jeannette Jara seulement parce qu’elle est très charismatique, nuance-t-elle. « C’est surtout le projet qui compte. »

Dans ce contexte, rien n’est joué et l’incertitude prédomine. Pour Victor Muñoz Tamayo, spécialiste de la gauche et des mouvements de jeunesse, le vote obligatoire (récemment instauré) pourrait être un atout imprévisible… Ou pas. « L’expérience internationale montre que cette obligation favorise la participation des classes populaires, ce qui logiquement devrait se traduire par un vote plus à gauche, mais cela n’a pas été le cas au Chili (lors du référendum de 2022 sur la nouvelle constitution – NDLR). Autrement dit, ici, le vote obligatoire a eu tendance à profiter à la droite. »

Dans un pays où la mémoire des années Pinochet reste vive, la candidate communiste incarne aussi le symbole d’un bouclier face à une droite extrême toujours plus outrancière. « J’ai subi l’emprisonnement politique et la torture pendant la dictature, explique la dirigeante syndicale Angela Rifo. J’ai vraiment peur de devoir être gouvernée par le fils d’un ancien nazi, et surtout de tout ce qu’il pourrait imposer à notre pays.»

Présidentielle au Chili : quand la droite impose la peur de la criminalité et la question migratoire

Ce dimanche 16 novembre, plus de 15 millions de Chiliens iront voter après plusieurs mois d’une campagne ou droite et extrême droite sont parvenues à imposer leurs thématiques favorites au centre du débat public.

Bien que le Chili reste l’un des pays les plus sûrs d’Amérique latine, la crainte d’une hausse de la criminalité s’est invitée dans les discours et les programmes des candidats à la présidence, et la question migratoire – présentée comme une menace dans des déclarations souvent xénophobes – est aussi apparue comme une priorité.

Oubliée, l’« explosion sociale » de 2019 ? Réunissant jusqu’à 2 millions de personnes dans les rues de Santiago, le formidable soulèvement populaire dénonçait haut et fort la vie chère et les injustices sociales héritées du modèle économique néolibéral forgé par la dictature de Pinochet…

LA CANDIDATE À LA PRÉSIDENCE, JEANNETTE JARA, SALUE LORS DE LA
CÉLÉBRATION DU 113ème ANNIVERSAIRE DU PARTI COMMUNISTE CHILIEN,
AU THÉÂTRE CAUPOLICÁN À SANTIAGO DU CHILI, LE 6 JUILLET 2025.

PRÉSIDENTIELLE AU CHILI : « CETTE ÉLECTION N’EST PAS UNE ALTERNANCE, MAIS UN CHOIX ENTRE DEUX VOIES DIAMÉTRALEMENT OPPOSÉES »

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Présidentielle au Chili : « cette élection n’est pas une alternance, mais un choix entre deux voies diamétralement opposées » / Pour le président du Parti communiste chilien, Lautaro Carmona, la présidentielle n’implique pas une simple alternance de gouvernement, mais « un choix entre deux voies diamétralement opposées ».


Luis Reygada Publié le 13 novembre 2025, 5 min

Trois fois interdit au Chili, persécuté durant la dictature de Pinochet et longtemps exclu de toute coalition, le Parti communiste du Chili (PCCh) voit le choix d’une de ses militantes à la tête de la coalition de centre-gauche comme une situation historique. Mais aussi comme un défi.

La plupart des observateurs s’accordent à dire que cette campagne a quelque chose d’historique. Pourquoi ?

Lautaro Carmona Président du Parti communiste chilien

LAUTARO CARMONA

Plusieurs éléments la rendent particulièrement importante et transcendante. Tout d’abord, il s’agit d’empêcher la victoire de programmes de droite qui prônent ouvertement des politiques très réactionnaires, ce qui signifierait un recul important dans de nombreux domaines, après de longues luttes.

Le danger, c’est de subir une refondation du système néolibéral. Les droites cherchent à l’approfondir en matière économique, mais aussi de droits sociaux, de valeurs et sur le plan international avec un réalignement avec les États-Unis.

Dans cette élection, il ne s’agit donc pas d’une sorte d’alternance entre un chef de gouvernement et un autre, mais d’un choix entre deux voies diamétralement opposées. Ce que les droites proposent, c’est une régression néolibérale brutale.

Que propose la gauche face aux mesures prônées par la droite et de l’extrême droite ?

Le programme pourrait être qualifié de « progressiste » : c’est un terme large à l’image de la coalition qui s’est construite pour mener cette bataille électorale. Nous avons constitué une alliance, une coalition d’une ampleur sans précédent. Jamais auparavant une coalition n’avait réuni aussi bien les démocrates-chrétiens que les communistes, en passant par tous les degrés intermédiaires, comptant neuf partis politiques au total.

En tant que communistes, nous comprenons que les luttes pour le pouvoir sont une question de rapports de force, et que les politiques d’alliances sont donc essentielles. Cette large coalition nous donne plus de force pour produire des changements, permettre au Chili de se redresser et de se remettre sur la voie des transformations, vers un pays plus juste.

► À lire aussi :         Élection présidentielle au Chili : Jeannette Jara, une communiste aux portes de la Moneda ?

Quelle est l’importance d’une coalition progressiste menée par une candidate communiste ?

C’est inédit. Jeannette Jara est militante du PCCh et n’est pas issue d’un accord entre les différents groupes politiques : elle est issue d’une élection primaire, c’est-à-dire d’une consultation citoyenne, qu’elle a remportée avec une large avance. Cela donne beaucoup de poids et de force à son leadership pour mener la coalition.

Cela a également représenté un défi pour les communistes : cohabiter dans une coalition dirigée par une figure du PCCh tout en acceptant que son action politique soit désormais beaucoup plus large que celle du parti. Mais nous comprenons parfaitement la situation et elle dispose de l’autonomie et de l’indépendance nécessaire pour agir politiquement en accord avec la mission qui lui a été confiée. C’est la contribution de notre parti à une cause plus grande, sans renoncer à notre identité et, bien sûr, en respectant les diversités afin de ne pas nuire à l’ampleur de l’unité.

Les élections législatives auront également lieu dimanche. A-t-il été difficile de préserver l’unité dans ce contexte ?

Tout a été mis en œuvre pour parvenir à un accord sur une liste parlementaire qui préserve l’unité. Il n’a pas été possible d’intégrer toutes les forces politiques, mais cela n’a pas affecté la bataille présidentielle.

Nous savons parfaitement qu’un gouvernement dirigé par Jeannette Jara aura besoin d’un soutien fort au Parlement pour obtenir les changements que nous souhaitons. L’expérience du mandat de Gabriel Boric montre qu’avec un Parlement hostile, tout est bloqué, et il est très difficile d’avancer.

« Nous sommes confrontés à un phénomène qui se produit au Brésil, en Argentine, au Pérou, un peu partout… »

Comment expliquer le soutien populaire dont bénéficient aujourd’hui les discours d’extrême droite et révisionnistes au Chili ?

Nous sommes confrontés à un phénomène qui se produit au Brésil, en Argentine, au Pérou, un peu partout… Il est frappant de voir comment les majorités populaires peuvent soutenir des politiciens élitistes qui, en fin de compte, servent les intérêts du grand capital…

De nombreux facteurs alimentent le populisme et la démagogie. Le rôle joué par la gauche, l’abstentionnisme, le désintérêt des électeurs en réponse au désintérêt des politiques publiques à leur égard, les ressources financières dont disposent droite et extrême droite, le rôle des médias et celui des réseaux sociaux, la corruption qui ronge l’État, l’insécurité qui affecte la vie quotidienne de millions de personnes… Autant d’éléments que les forces de droite ont su exploiter ou manipuler.

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LE CHILI VEUT SE DOTER D’UN MÉGA PORT DANS LA VILLE CÔTIÈRE DE SAN ANTONIO

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PORTE-CONTENEURS DANS LE PORT DE SAN ANTONIO
PHOTO RAUL BRAVO

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France Inter
Au Chili, Pékin convoite la construction d’un nouveau port /  Le Chili veut se doter d’un méga port dans la ville côtière de San Antonio afin de conserver son rôle de porte d’entrée sur le continent. Deux entreprises chinoises ont répondu à l’appel d’offres, une façon d'accroître l’influence de Pékin en Amérique Latine

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«Au Chili, Pékin convoite la construction d’un nouveau port»
DIFFUSION MERCREDI 12 NOVEMBRE 2025

Par Naïla Derroisné Publié le mercredi 12 novembre 2025  

Temps de lecture 2 min

L’agrandissement du port permettra d’additionner 60 millions de tonnes supplémentaires par an.” explique Eduardo Abedrapo, le président du directoire de l’Entreprise Portuaire de San Antonio. Ce port est le neuvième le plus important de l’Amérique Latine avec le chargement de 24 millions de tonnes de marchandises y ont transité.

Chili / élection présidentielle le 16 novembre 2025

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FLYER JANNETTE JARA

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Une question de concurrence ?

La construction d’un nouveau port à San Antonio fait partie de la suite logique. Mais elle est peut-être aussi une façon de gagner du terrain sur son voisin péruvien. Le Pérou possède lui aussi un port. Pourtant, Eduardo Abedrapo explique qu’il ne s’agit pas d’une compétition.

À l’inverse d’Alberto Rojas, directeur de l’Observatoire des affaires internationales de l’université Finis Terrae, à Santiago qui y voit une compétition entre les deux pays qui “ont bien conscience de l’importance de gérer et administrer des ports dans le Pacifique” mais surtout car, selon lui, “le Pacifique sud regarde vers le continent asiatique, évidemment que cela met le Chili et le Pérou dans une position très importante et stratégique.”

Et la Chine dans cette compétition ?

“La Chine a clairement établi son catalogue de matières premières en Amérique du sud.” Pour le Chili, “il s’agit du cuivre et bientôt du lithium, fondamental pour la construction de batteries, de téléphones et d’ordinateurs” déclare Luis Lira, chercheur à l’université Finis Terrae.

Reportage signé Naïla Derroisné, correspondante France Inter

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PRÉSIDENTIELLE AU CHILI: DERNIER MEETING POUR JEANNETTE JARA, CANDIDATE DE LA GAUCHE

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SANTIAGO DU CHILI, LE 11 NOVEMBRE 2025: LA CANDIDATE DE L'UNION DES GAUCHES
 ET L'UN DES DEUX FAVORITES DU SCRUTIN, JEANNETTE JARA ÉTAIT EN MEETING DANS LA CAPITALE.
PHOTO LUIS HIDALGO

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RFI
Présidentielle au Chili: dernier meeting pour Jeannette Jara, candidate de la gauche / 
Au Chili, 15 millions d’habitants seront appelés aux urnes dimanche 16 novembre pour l’élection présidentielle. C’est donc la dernière ligne droite pour les huit candidats qui tiennent cette semaine leurs meetings de fin de campagne. José Antonio Kast et Jeanette Jara, les deux favoris, organisaient le leur au même moment mardi soir à Santiago.

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«Présidentielle au Chili: dernier meeting pour Jeannette Jara, candidate de la gauche»
DIFFUSION MERCREDI 12 NOVEMBRE 2025

Par RFI avec notre correspondante à Santiago, Naïla Derroisné

Publié le : 12/11/2025 -  Temps de lecture 2 min

Le leader de l’extrême droite, José Antonio Kast avait privatisé une géante salle de concert au cœur de la capitale. Tandis que Jeannette Jara, la favorite et représentante du camp progressiste, réunissait ses sympathisants en plein air dans l’une des communes les plus peuplées de la capitale.

Chili / élection présidentielle le 16 novembre 2025

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Des milliers de personnes étaient réunies sur la place Maipú agitant drapeaux chiliens et criant « Jeannette Jara présidente ! ». 

Connue pour ces capacités à dialoguer, Jeannette Jara a réussi le pari de représenter une grande partie de la gauche et du centre gauche, nous explique Manuel. « C’est sans aucun doute la candidature progressiste et de gauche avec l’alliance la plus large que notre pays a connu car neuf partis la soutiennent ». « Malgré différentes visions, elle a montré qu’elle peut proposer quelque chose de concret », renchérit Pablo.

À lire aussi : Présidentielle au Chili: la sécurité et la lutte contre le narcotrafic au cœur des débats

Jeannette Jara qui, selon les sondages, remporterait le premier tour dimanche, mais sans majorité absolue. Elle pourrait alors affronter au second scrutin le candidat de l’extrême droite dans un contexte compliqué en raison notamment de sa militance communiste, estime Felipe.

« Le fantôme du communisme est grand, surtout en Amérique Latine. Je sais qu’elle passera au premier tour étant donné la forte mobilisation qu’on voit ici, mais j’ai un peu peur pour le second. »

La candidate, elle, anticipe d’ores et déjà un entre-deux-tours serré et lance un appel. « Discutons avec ceux qui ont des doutes et aussi avec ceux qui pensent différemment ! »

Jeannette Jara a centré le reste de son discours sur son programme social, son origine populaire et ses ambitions pour un Chili plus égalitaire.

Chili: la candidate Jeannette Jara clôture
sa campagne présidentielle à Santiago

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mercredi, novembre 12, 2025

PRÉSIDENTIELLE AU CHILI: LA SÉCURITÉ ET LA LUTTE CONTRE LE NARCOTRAFIC AU CŒUR DES DÉBATS

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LES CANDIDATS À L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DU 16 NOVEMBRE SE SONT
AFFRONTÉS LORS D'UN DÉBAT TÉLÉVISÉ LE 10 NOVEMBRE, DÉBAT QUI A
ESSENTIELLEMENT PORTÉ SUR LES QUESTIONS SÉCURITAIRES
ET LA LUTTE CONTRE LE TRAFIC DE STUPÉFIANTS.
PHOTO ESTEBAN FELIX

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RFI
Présidentielle au Chili: la sécurité et la lutte contre le narcotrafic au cœur des débats / 
Au Chili, les huit candidats à l’élection présidentielle du 16 novembre s’affrontaient, lundi 10 novembre, lors d’un ultime débat à la télévision. En tête de cette élection polarisée se trouve, selon les sondages, la candidate du bloc de gauche, suivie de trois candidats de droite et d’extrême droite. Et toujours selon les sondeurs, aucun ne remporteraient le vote dès le premier tour, ce qui donnerait lieu à un second scrutin en décembre. Dans cette dernière ligne droite, chaque candidat tente alors de faire la différence. 

  [ Pour écouter, cliquez ici ! ]

«Présidentielle au Chili: la sécurité et la lutte contre le narcotrafic au cœur des débats»
DIFFUSION MARDI 11 NOVEMBRE 2025

Par RFI

bien que figurant parmi les pays les plus sûrs d'Amérique latine, le Chili a vu ces dernières années une montée de la criminalité organisée, le taux d'homicide y passant de 2,5 à 6,7 pour 100 000 habitants en dix ans. Aussi, sans grande surprise, le débat a commencé par des questions sur la sécurité publique et la lutte contre le narcotrafic, les principales préoccupations des Chiliens en ce moment et également la priorité de presque tous les candidats, rapporte notre correspondante à Santiago, Naïla Derroisné.

Chili / élection présidentielle le 16 novembre 2025

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FLYER JANNETTE JARA

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« A la carcel o en el cementerio ! ». Les délinquants et narcotrafiquants iront « en prison ou au cimetière ! », a lancé la candidate de la droite traditionnelle, Evelyn Matthei. Tandis que le candidat libertarien, Johannes Kaiser, a réaffirmé sa volonté de rétablir la peine de mort dans des cas de viols ou encore d’enlèvements.

José Antonio Kast, à l’extrême droite, veut fermer les frontières et construire des prisons de haute sécurité, comme celles du président Nayib Bukele au Salvador, qu’il admire.

À gauche cette fois, traquer l’argent des narcotrafiquants, c’est la stratégie de Jeannette Jara, la candidate de la gauche réunie qui veut pour cela lever le secret bancaire.

Pendant trois heures, les candidats se sont aussi lancé des attaques. José Antonio Kast pointant du doigt le chômage en hausse alors que la candidate de la gauche était ministre du Travail sous l’actuel gouvernement, il y a encore quelques mois. Jeannette Jara qui a, pour sa part, reproché au candidat d’extrême droite d’éluder les questions des journalistes au sujet des violations des droits de l’homme pendant la dictature. José Antonio Kast, grand défenseur d’Augusto Pinochet, évite désormais d’y faire directement référence.

Si l'ancienne ministre du Travail est donnée en tête pour le premier tour dans les sondages, les enquêtes d'opinion prévoient la victoire d'un candidat de droite ou d'extrême droite au second tour, grâce au report des voix, précise l'Agence France-Presse.

Chili: la candidate Jeannette Jara clôture sa campagne présidentielle à Santiago

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