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| DESSIN DE RAINER HACHFELD |
International / Amériques / Chili. José Antonio Kast, ce fils de nazi et admirateur de Pinochet qui veut devenir président / Souriant comme un vendeur de bibles José Antonio Kast est aussi fils de nazi, fan de Pinochet et ultraconservateur. Pour autant, rien de tout cela n'empêche le candidat chilien d'extrême droite d'être en lice pour devenir le 40ème président de son pays. Et pas même ses promesses d'expulser les migrants, de sabrer les dépenses de l'État et de repeindre la démocratie à la chaux de l'ordre moral.
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Charlie
Hebdo
par Étienne Le Page 5 min. de lecture / Publié le 13 12 novembre 2025 à 21h37
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| JOSÉ ANTONIO K4ST LORS D’UN DÉBAT PRÉSIDENTIEL D’ENTRE-DEUX-TOURS, À SANTIAGO, LE 10 DÉCEMBRE 2021. PHOTO MARTIN BERNETTI |
Sur les plateaux télé, José Antonio Kast sait sourire. Dans les débats, il use d’une voix douce et placide pour contredire ses opposants. Quand il détaille son programme, face caméra, il est bien peigné et systématiquement vêtu d’un sérieux blazer bleu marine. Pas méchant pour un sou. Il a parfois même l’air un peu benêt. Mais sous ses belles coutures, l’admirateur assumé de Pinochet, fils de nazi, est résolument d’extrême droite. Dimanche, ou lors d’un potentiel second tour en décembre prochain, José Antonio Kast pourrait devenir le 40ème président du Chili.
Chili / élection présidentielle le 16 novembre 2025
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| FACSIMIL D'UN BULLETIN DE VOTE FLYER JANNETTE JARA |
► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR
Car ce week-end, les citoyens chiliens sont appelés à voter pour le premier tour des élections présidentielles. En tête des sondages caracolent Jeannette Jara, candidate issue de la gauche communiste et proche de l’actuel président Gabriel Boric, et deux figures de l’extrême droite, Johannes Kaiser et José Antonio Kast. Ce dernier, père de neuf enfants et ancien avocat de 59 ans, brigue pour la troisième fois consécutive le mandat présidentiel. Depuis 2017, l’homme politique avance à pas de velours, derrière un masque de gendre idéal. Dans le fond, le millionnaire a pourtant tout à voir avec ses pairs : Milei et sa tronçonneuse, Trump et ses charters de migrants, Bukele et ses mégas prisons.
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| LE CANDIDAT CONSERVATEUR À LA PRÉSIDENTIELLE CHILIENNE JOSÉ ANTONIO KAST, DU PARTI RÉPUBLICAIN, LORS DU LANCEMENT DE SA CAMPAGNE À TEMUCO, AU CHILI, LE 25 SEPTEMBRE 2025. PHOTO JUAN GONZALEZ |
Au commencement, Pinochet
Aux origines de la vision politique de José Antonio Kast, il y a Pinochet. À la faculté de droit, le jeune étudiant est un disciple de Jaime Guzman, tête pensante du dictateur. « S’il était vivant, il voterait pour moi », résumait-il, bien des années plus tard. Pour l’ancien député, « abstraction » faite des droits de l’homme, le régime de Pinochet « a plus fait pour le développement du pays que celui de Sebastián Piñera [président conservateur du Chili de 2010 à 2014, ndlr] ». Vingt-sept ans de démocratie. C’est le temps qu’il aura fallu attendre pour voir un politicien assumer publiquement cet héritage. Au Chili, la dictature militaire pinochetiste, instaurée entre 1973 et 1990, s’est fait une spécialité de la torture et l’exécution des opposants politiques. Le bilan de ces 17 années de dictature, établi patiemment par de nombreux acteurs au fil des ans, fait état de 30 000 prisonniers politiques et 3 065 morts et disparitions.
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Qu’importe : pour l’ultralibéral qu’est Kast, Pinochet reste un exemple sur de nombreux points. Économiquement, le multimillionnaire entend imiter, s’il est élu, les mesures du dictateur, basées sur les préceptes de l’École de Chicago. Comprenez : une déréglementation massive de l’économie, une réduction drastique du rôle de l’État et des privatisations en cascade. De quoi rappeler la tronçonneuse et les coupes budgétaires du président Javier Milei. La politique de l’Argentin, qui avait effectivement réduit une inflation astronomique, a néanmoins engendré une baisse de la consommation et des salaires ainsi qu’une hausse du chômage dans le pays. S‘il devient président, Kast a promis d’imiter son modèle en économisant « 6 milliards de dollars en dix-huit mois », sur le dos de l’État.
Fini les bêtises
Mais revenons en arrière. Avant de se rêver président, José Antonio Kast a suivi le parcours classique. Sur les bancs de l’Assemblée, l’édile effectue trois mandats au sein du parti conservateur chilien : l’Union des démocrates indépendants (UDI). À l’étroit, plein d’ambition, il quitte le parti et se présente dès 2017 à la présidentielle, sans structure derrière lui. Il termine au pied du podium, cumulant 7,9 % des suffrages. José Antonio Kast se voit obliger de fonder sa propre organisation politique : le Parti républicain. La quête du pouvoir continue. Et les outrages pleuvent. Lors de sa seconde campagne, le candidat multiplie les sorties polémiques. À l’époque, il exprime dans son programme sa volonté d’interdire « l’avortement en toutes circonstances », « promouvoir la religion dans les écoles », et même « autoriser le port d’armes aux civils » pour lutter contre l’insécurité.
Un passé qu’il tente de gommer, dans sa dernière campagne. José Antonio Kast semble s’être adouci. Terminé les frasques machistes, et les promesses d’abrogation de la loi sur l’avortement. Révolu, le temps où ce fervent catholique réprouvait publiquement le mariage gay. Place au nouveau Kast, focalisé sur les immigrés et la sécurité. Les thèmes changent, la méthode reste. Tranchées et murs aux frontières, prisons de haute sécurité, armée dans les rues : tout indique que José Antonio Kast a mûri son projet. Aujourd’hui, il espère expulser « tous les migrants » de son pays. Pas moins des 330 000 personnes, donc, et beaucoup d’enfants. Au Chili, où le crime organisé est, entre autres, importé par des cartels vénézuéliens, ce « plan implacable » qu’il veut mettre en place séduit. À quelques jours du premier tour, le sourire Colgate de Kast est crédité de 20 % des voix.
Reste à savoir si les Chiliens passeront à ce fils d’officier nazi et frère d’un ancien ministre de Pinochet cette lourde filiation. Il ne faut pas, après tout, prêter au fils les idées du père. Un père, Michael, comme l’a révélé le journaliste et chercheur Mauricio Weibel, qui était bel et bien titulaire d’une carte de membre du Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP), le parti nazi. Fuyant l’Allemagne, la famille bavaroise s’installe dans la banlieue de Santiago et fait fortune dans la production de saucisses. Près de 70 ans après, José Antonio Kast garde une affection certaine pour les traditions familiales. Lors de sa première campagne, il affirmait dans un débat télévisé : « Je crois en des choses simples : en Dieu, la famille et la patrie ? » Rassurons-nous, José Antonio Kast n’est pas un nostalgique de Hitler, mais plutôt du maréchal Pétain.
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ALVARO HENRIQUEZ Y PETTINELLIS
Con un VOTE POR JARA y la presentación de Alvaro Hernirquez y PETTINELLI
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