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C’est un salon où se croisaient l’intelligentsia parisienne et les écrivains latino-américains. Celui de l’ambassade du Chili à Paris. Le poète Pablo Neruda y avait été nommé par Allende, le romancier Jorge Edwards le secondait. Aujourd’hui ambassadeur, il se souvient.
On finit nos vies dans l’enveloppe où nos souvenirs sont écrits. Parfois, ils sont postés de Paris. Il existe un romancier de 81 ans qui, depuis deux ans, dans l’homérique tradition latino-américaine des écrivains-diplomates, clôt sa carrière dans la ville même où, voilà cinquante ans, il l’a presque débutée. Il est ambassadeur du Chili en France, prix Cervantès de littérature, amateur de bon vin, de danse et de jolies femmes, et il s’appelle Jorge Edwards.
Sur les murs du salon de réception, près des vieilles tapisseries françaises représentant des scènes de chasse, il a mis un tableau de Matta, «d’autant mieux qu’il ressemble à un Bacon», et les encres d’un artiste chilien de sa génération, Carlos Faz, qui, à 23 ans, se jeta d’un bateau pour rejoindre à la nage La Nouvelle-Orléans, et se noya. C’est l’âge qu’avait Edwards lorsqu’il écrivit pour la première fois à Pablo Neruda. On n’imagine plus, aujourd’hui, ce que fut la gloire de Neruda. C’était le temps où certains écrivains étaient des pop-stars.