lundi, mai 31, 2021

LE CHILI MAINTIENT DES CHIFFRES INQUIÉTANTS DE COVID-19

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PHOTO MERCOPRESS

Santiago du Chili, 31 mai 2021. Le Chili a clôturé le troisième mois le plus meurtrier depuis le début de la pandémie de Covid-19 en mars 2020, le ministère de la Santé faisant état ce dimanche de 7 772 nouvelles infections et de 121 décès dus à la maladie.
 

Prensa Latina

Le rapport officiel pour la journée de samedi, jusqu'à 21 heures (heure locale) montrait une diminution des nouvelles infections, après que les trois jours précédents aient largement dépassé les huit mille cas par jour.

Toutefois, les experts ont averti que le chiffre d'hier a été beaucoup plus élevé que celui de dimanche dernier, où le nombre d'infections était de 6 519, ce qui montre la gravité de la situation.

À ce jour, le nombre total de personnes infectées, depuis que la première infection a été signalée dans le pays le 3 mars de l'année dernière, s'élève à un million 377 507 personnes, et celui du total des décès à 29 168.

Sur une note d'espoir, les résultats des 77 488 tests PCR rapportés par les laboratoires au cours des dernières 24 heures traduisent une positivité moyenne nationale de 9,01 pour cent, après plusieurs jours consécutifs au-dessus de 10.

Cependant, la situation est à nouveau critique dans les unités de soins intensifs (USI), où, selon le rapport officiel, il n'y a que 178 lits disponibles dans tout le pays sur un total de 4 444, avec plusieurs territoires où une occupation totale est signalée dans plusieurs hôpitaux.

Le rapport fait état de 44 928 patients actifs, ce qui pourrait avoir un impact encore plus négatif dans les prochains jours en raison d'une plus grande occupation des lits, ont averti les dirigeants de la Société chilienne de médecine de soins intensifs.

La veille encore, le sous-secrétaire aux réseaux de soins de santé, Alberto Dougnac, évoquant la question, a admis que le pays se trouvait à un moment critique en termes d'occupation des lits de soins intensifs et a appelé à une plus grande coopération de la population. peo/jcc/ga/rc/gdc

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VENTE À LA CRIÉE : « DU PASS SANITAIRE »
DESSIN LAUZAN
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mercredi, mai 26, 2021

ASSEMBLÉE CONSTITUANTE AU CHILI : «NOUS SOUHAITONS RÉCUPÉRER TOUS LES BIENS ÉLÉMENTAIRES NÉCESSAIRES À LA VIE »

PHOTO RODRIGO ARANGUA  / AFP
Plus de la moitié des membres de l’assemblée sont des élus indépendants. Ils souhaitent changer le modèle néolibéral du pays et inscrire dans la nouvelle Constitution l’accès aux droits sociaux basiques.

Par Flora Genoux(Buenos Aires, correspondante)

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des professeurs, des avocats, une conductrice de bus, un mécanicien… La future boussole du Chili est entre leurs mains. Les 15 et 16 mai, les citoyens ont désigné les 155 personnes chargées de rédiger la nouvelle Constitution, qui doit remplacer le texte actuel hérité de la dictature (1973-1990) et accusé de sanctuariser les bases libérales du pays.

Grande surprise, qui révèle et panse à la fois la crise de représentativité chamboulant la vie politique chilienne : plus de la moitié des élus sont des indépendants, qui ne militent pas au sein d’un parti, et portent la volonté de repenser en profondeur les fondements du pays.

- Ñ - ÉLECTIONS AU CHILI PROPAGANDE ÉLECTORALE

Ahora es tiempo de dar la cara #KarinaDaLaCara

Souvent, leurs combats préfigurent le mouvement social contre les inégalités de fin 2019, qui a ouvert la voie à cet inédit processus constitutionnel. Militants pour la protection de l’environnement ou des populations autochtones, certains participaient déjà à la vie politique, dans son sens large : leurs propositions seront nourries de leurs connaissances thématiques doublées de solides assises locales, l’élection reflétant les différentes régions du pays.

Une certitude : il s’agit de l’assemblée la plus représentative de l’histoire chilienne, avec 77 femmes et 17 sièges réservés aux populations autochtones. Habités par le sentiment d’une « grande responsabilité » et un vif espoir, trois élus contactés détaillent les idées qu’ils défendront lors des neuf mois – prolongeables de trois mois – dont ils disposent pour l’écriture de la nouvelle « Magna Carta ».

Rosa Catrileo, avocate, 39 ans : « Il faut reconnaître le droit des Mapuches à récupérer leurs territoires »

PHOTO COLLECTION PERSONNELLE
Elle admet avoir hésité à se présenter, face à l’ampleur de la tâche. « Mais c’était l’heure des femmes et je ne pouvais pas rester en dehors de cette opportunité historique pour le peuple mapuche à participer », raconte l’avocate mapuche à Temuco (Centre), spécialiste des dossiers traitant des droits de sa communauté.

Elle entend œuvrer pour la reconnaissance formelle des peuples indigènes – plus de 12 % de la population – avec pour référence les Constitutions de Bolivie ou d’Équateur, qui posent les bases d’un État plurinational. « Mais cela ne suffit pas, il faut reconnaître le droit des Mapuches à récupérer leurs territoires, qui ont été envahis par l’État », avance l’avocate.

Les conflits sociaux, parfois émaillés de violence, qui opposent les peuples autochtones à l’État, aux firmes forestières ou minières ponctuent la vie du pays. La lutte de Rosa Catrileo n’est pas nouvelle. Depuis ses années étudiantes, elle se mobilise pour la reconnaissance des droits des Mapuches et leur visibilité culturelle. A la mi-mai, elle a d’ailleurs voté vêtue de l’habit traditionnel propre aux jours de fête.

En octobre 2019, l’élue a observé le mouvement social « avec solidarité », sans y participer directement. « Nous, les Mapuches, nous luttions déjà, nous ne nous sommes jamais endormis », remarque-t-elle, en allusion à l’un des grands slogans du mouvement contre les inégalités, « Le Chili s’est réveillé ». Mais, au sein de l’Assemblée, elle refuse de se limiter « à un ghetto, celui des peuples autochtones – ce serait un échec », et souhaite intervenir sur des sujets transversaux, comme l’organisation de l’État, l’économie ou l’environnement : « Je vais porter la vision qui est celle du peuple autochtone, qui défend la biodiversité, et un autre modèle économique, avec l’idée que tout n’est pas transformable en richesse. »

À contre-courant des réticences qui peuvent être celles de sa communauté, elle défend le droit à l’avortement: « Les principes mapuches respectent l’individualité et la diversité. » Cette mère de trois enfants ressent « une grande responsabilité », mais nuance : « Nous, les Mapuches, nous avons une légitime méfiance et nous ne pensons pas que la Constitution va régler tous les problèmes. Mais nous avons aussi le newen [la force, en mapuche], pour relever le défi. »

Gaspar Dominguez, 32 ans, médecin : « La Constitution doit inscrire un droit à la santé pour tous »

COLLECTION PERSONNELLE
Le porte-à-porte, il connaissait déjà. Pendant sa campagne, le médecin rural originaire de la capitale, Santiago, raconte avoir poursuivi le contact quotidien de proximité qu’il entretient habituellement à Palena. «Les habitants ont reconnu mon travail communautaire », affirme-t-il depuis son bureau, où trône une carte du Sud chilien, sa région d’adoption depuis six ans. « Comme médecin, je suis au premier poste d’observation des inégalités en matière de santé. J’ai une patiente sexagénaire qui est depuis trois ans sur liste d’attente pour une prothèse du genou. Elle ne peut pas marcher. Si elle avait de l’argent, elle l’aurait déjà », rapporte Gaspar Dominguez qui, lors de l’entretien vidéo avec Le Monde, porte encore sa blouse de l’hôpital public.

Lire aussi  Au Chili, la parité a profité aux hommes lors de l’élection de l’Assemblée constituante

La prochaine Constitution chilienne doit inscrire « un droit à la santé pour tous, avec une couverture universelle », insiste celui qui ne se reconnaît pas dans les partis politiques traditionnels, « pourtant nécessaires ». En 2018, il milite pour l’installation de distributeurs de préservatifs dans les lycées de sa région, initiative qui a essaimé ailleurs dans le pays. « Il faut aussi garantir le droit à l’éducation, à un logement digne, à l’égalité numérique », énumère-t-il, en écho aux demandes centrales du mouvement contre les inégalités, survenu en 2019.

Sur ses réseaux sociaux, il affiche un drapeau aux couleurs de l’arc-en-ciel. « Je suis homosexuel, ce n’est ni un secret » ni un étendard, avance l’élu. « Les couples homos doivent avoir les mêmes droits que les hétéros, en matière de mariage et de filiation », estime-t-il. Au Chili, un projet visant à légaliser le mariage pour les personnes de même sexe est pour l’instant gelé au Parlement.

Où siégeront les constituants ? « Ce serait absolument déconnecté de la réalité que de siéger dans un palais de l’aristocratie », critique Gaspar Dominguez, en référence au palace du XIXe siècle mis à disposition à Santiago comme espace de travail. « Je défends la décentralisation de l’État, l’assemblée doit siéger de façon intermittente dans chaque région », poursuit-il alors que le règlement de la convention constituante doit encore être déterminé par ses membres. « Je souhaite que cette Constitution permette aux citoyens de récupérer le lien avec l’institutionnalité, pour cela il faudra que les débats se fassent au plus près de la population et dans le respect. »

Constanza San Juan, 35 ans, militante environnementale : « L’eau doit être inappropriable »

PHOTO COLLECTION PERSONNELLE
Sa candidature a été « choisie » par une assemblée locale, librement constituée à Alto del Carmen (Nord) avant les élections, et Constanza San Juan veille à utiliser le pluriel pour détailler ses propositions : « Je porte la voix de celles et ceux qui m’ont désignée. » Cette diplômée d’histoire s’investit depuis près de dix ans dans la province d’Atacama, où elle milite pour la protection de l’environnement et devient l’une des figures qui emporte le combat local contre le projet minier de Pascua Lama, reconnu responsable d’importantes violations environnementales.

Constanza San Juan, 35 ans, militante environnementale. Les photos ont été prises pendant la campagne pour l’élection constituante, dans le nord du pays, dans la province d’Atacama.

Elle se définit d’ailleurs comme « une gardienne de la terre ». « Nous souhaitons récupérer tous les biens élémentaires nécessaires à la vie : les glaciers, l’eau, les bois, la mer, les sols et les sous-sols. Et les déclarer inappropriables. » L’eau, privatisée au Chili, a fait partie des thématiques centrales du soulèvement social de 2019. Les organisations environnementales dénoncent son usage démesuré par les secteurs miniers ou agricoles notamment, au détriment de la population locale. « Le problème du Chili ce n’est pas la sécheresse mais le pillage de l’eau », estime Constanza San Juan, qui souhaite en finir avec le « modèle extractiviste prédateur et néolibéral » – dont le pilier est le secteur du cuivre – et considérer l’environnement comme « un sujet de droit ».

À l’instar des autres candidats marqués à gauche, et qui forme le gros des élus de la convention, elle défend les grands droits sociaux : « Education, santé, retraites, logements dignes », ainsi que la légalisation de l’avortement. Expression de la décentralisation, selon elle, l’assemblée devrait siéger dans les différentes provinces, mais aussi assurer sa transparence et la participation des citoyens. Habitée par un grand enthousiasme et « la foi du changement », Constanza San Juan raconte se sentir prête : « Ce processus nous saisit à un moment de grande maturité, nous les mouvements sociaux. »

Régulièrement décrit comme « le laboratoire du libéralisme », le Chili peut renverser l’expérience, estime l’élue, qui voit dans le processus constitutionnel un possible exemple international : « On souhaite casser les vieux schémas, et changer réellement de modèle. » Flora Genoux (Buenos Aires, correspondante)

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mardi, mai 25, 2021

CHILI : LE GOUVERNEMENT MET EN PLACE UN PASS SANITAIRE, MALGRÉ DES CONTAMINATIONS EN HAUSSE

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VENTE À LA CRIÉE : « DU PASS SANITAIRE »
DESSIN LAUZAN

Au Chili, près de 40% de la population a déjà reçu deux doses de vaccin contre le Covid-19. Mais une grande partie du pays reste confinée, car le virus continue de beaucoup circuler. Dans ce contexte, le gouvernement va mettre en place dès ce mercredi 26 mai un « pass sanitaire » ou « pass mobilité » qui permettra aux personnes vaccinées de sortir sans permis, même pendant le confinement. Un pass qui donnera aussi le droit aux habitants qui sont confinés le week-end de voyager hors de leur région.

Avec notre correspondante à Santiago, Justine Fontaine

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PHOTO  IVAN ALVARADO

Dans le centre-ville de Santiago, Inès, 70 ans, est vaccinée depuis plus d'un mois. Elle est ravie de l'annonce de ce pass sanitaire : « Je suis très contente car je n'avais pas pu aller dans ma résidence secondaire, et là je vais enfin pouvoir le faire. »

Un peu plus loin, Cristian, 50 ans, aimerait bien avoir accès lui aussi à ce pass mobilité, présenté par le gouvernement « Je ne comptais pas me faire vacciner, mais cette annonce me fait changer d'avis, et pour y accéder, je suis prêt à sauter le pas. »

28 000 morts

Pourtant assez peu de Chiliens sont anti-vaccins, mais les soignants craignent surtout que cette mesure favorise la propagation du virus. Comme José Luis Espinoza, de la Fédération nationale des infirmiers, interrogé par une radio chilienne : « Cette annonce suscite de la confusion. Il est aberrant de permettre aux habitants de se déplacer davantage alors que la pandémie n'est pas encore sous contrôle ».

Les services de réanimation sont occupés à plus de 300% par rapport à la période antérieure au début de la pandémie, et le nombre de cas de Covid est en nette hausse au Chili depuis deux semaines.

Le Covid-19 a fait plus de 28 000 morts au Chili, pour 19 millions d'habitants.

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dimanche, mai 23, 2021

CHILI : COMMENT IRACÍ HASSLER, LA MAIRE DE SANTIAGO, BOUSCULE L'ORDRE ÉTABLI

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IRACÍ HASSLER, LA MAIRE DE SANTIAGO.
PHOTO AFP

La communiste chilienne de 30 ans Irací Hassler, élue il y a une semaine à la tête de la capitale Santiago, symbolise le rejet des électeurs pour les partis politiques traditionnels.

Le Journal du dimanche 

PHOTO RODRIGO ARANGUA  / AFP

s'il y avait un visage pour incarner le coup de balai qu'a connu, dans la nuit de dimanche à lundi, le paysage politique chilien, ça serait le sien. Conseillère municipale de Santiago du Chili depuis cinq ans, l'économiste Irací Hassler a réussi à déloger de son siège le maire de centre droit Felipe Alessandri. La capitale sera désormais dirigée par cette jeune femme communiste et féministe de 30 ans, de mère brésilienne et de père chilien, qui avait activement participé aux manifestations étudiantes de 2011 pour réformer le système d'éducation. Une performance que le Parti communiste n'était jamais parvenu à réaliser, même sous la présidence de Salvador Allende au début des années 1970!

Un pied de nez au président conservateur Sebastián Piñera

Sa victoire est un pied de nez au président conservateur Sebastián Piñera, qui avait mis toutes ses forces dans la bataille pour triompher lors de cet important week-end électoral. Car les Chiliens n'ont pas seulement désigné leurs maires mais aussi voté pour choisir la future Assemblée constituante, chargée de réécrire d'ici un an la loi fondamentale du pays datant de la dictature militaire d'Augusto Pinochet (1973-1990). Surprise, ils ont opté en majorité pour des candidats indépendants, plutôt proches du centre gauche. À l'image d'Irací Hassler, qualifiée de "persévérante", "collective" et "combattante" par ses proches.

jeudi, mai 20, 2021

EN MARCHE FORCÉE

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« TERRASSES OUVERTES»


AU CHILI, LA PARITÉ A PROFITÉ AUX HOMMES LORS DE L’ÉLECTION DE L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE

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PHOTO JUAN GONZALEZ / REUTERS

Davantage de femmes ont été élues au scrutin des 15 et 16 mai et certaines doivent céder leur siège, en vertu des mécanismes de correction. 
l’élection de l’Assemblée constituante au Chili n’en finit pas de livrer son lot de surprises. Première mondiale, l’Assemblée chargée de rédiger une nouvelle Constitution, dont les 155 membres ont été élus les 15 et 16 mai, est entièrement paritaire, à un siège près. Plusieurs mois avant le scrutin, en mars 2020, les organisations féministes avaient obtenu l’inscription de cette règle, également appliquée aux candidatures : chaque liste, établie par affinité idéologique et district, devait comporter autant d’hommes que de femmes, afin de garantir une offre électorale strictement égale dont les résultats seraient éventuellement rééquilibrés. Ceux-ci l’ont finalement été à la faveur des hommes : au total, 11 femmes élues ont dû céder un siège à un homme et cinq hommes à une femme, selon l’Observatoire de la nouvelle Constitution, un centre d’études analysant le processus constitutionnel.

« C’est ça la parité. D’ailleurs, il est préférable d’employer le mot “intégrer” à “céder”. Il n’a jamais été question de surreprésenter les femmes, la parité de cette élection reste la plus grande avancée démocratique de ces dernières années au Chili », estime Pamela Figueroa, politiste et coordinatrice de l’Observatoire de la nouvelle Constitution. La modification au sein des dix-sept sièges réservés aux populations autochtones, sorte d’élection dans l’élection, s’avère particulièrement frappante : quatre femmes élues ont laissé leur siège à un homme. En vertu de ces mêmes mécanismes de correction, le siège supplémentaire au sein de l’Assemblée revient d’ailleurs à un homme : ils sont 78 pour 77 femmes.

« La parité ne relève pas d’un coup de main additionnel pour les femmes mais du principe d’égalité », corrobore Catherine Reyes-Housholder, chercheuse au Centre d’études du conflit et de la cohésion sociale (COES) et spécialiste des questions de genre en politique. « Les études montrent que, sans loi de parité, les partis tendent à proposer davantage de candidats hommes, en supposant que les citoyens préfèrent ce genre de profil. Or, on s’aperçoit, avec cette élection, que si l’offre est paritaire, les citoyens votent autant ou plus pour des candidates femmes qui sont tout aussi compétitives », analyse la chercheuse.

« Renouveau politique »

Autre surprise du scrutin : la grande victoire des candidatures indépendantes, dans l’ensemble marquées à gauche. Dans le détail, les femmes ont été préférées aux hommes sur ces listes-là, selon l’Observatoire de la nouvelle Constitution. « Les femmes incarnent davantage le renouveau politique », analyse Mme Figueroa. Durant la période précédant le scrutin, de nombreuses candidates ont clairement revendiqué leur féminisme, une première également pour une campagne. « Rentrer chez nous et retrouver un foyer sûr (sans violence de genre), cela relève du sens commun », clame ainsi, dans son spot de campagne, Giovanna Roa Cadín, l’une des candidates élues sur une liste de gauche, portant, noué au poignet, un foulard vert, symbole de la lutte pour la légalisation de l’avortement.

Certaines exigences, comme la parité dans les institutions ou en entreprise, sont prônées par tous les partis politiques. Nombreux ont proposé que les tâches domestiques soient reconnues comme un travail, les confinements ayant davantage requis l’investissement des femmes au sein des foyers. La question des droits sexuels, notamment la légalisation de l’avortement − autorisé au Chili seulement en cas de viol, de danger pour la vie de la personne enceinte ou d’inviabilité du fœtus −, reste clivante et plutôt défendue par les élues marquées à gauche.

Mais la parité numérique garantit-elle l’égalité de fait ? L’Assemblée prévoit une présidence et une vice-présidence, dont les genres ne sont pas, pour l’instant, déterminés. Son fonctionnement, autour de commissions thématiques, doit également être défini. « Or, on sait qu’au sein du Parlement, par exemple, les commissions prestigieuses sont entre les mains des hommes et les moins prestigieuses, comme celles de l’égalité de genre ou de la famille, composées par davantage de femmes », remarque Catherine Reyes-Housholder. « Il y a aussi des enjeux liés à la prise de parole, dans les assemblées, les hommes tendant à interrompre davantage », avertit la spécialiste.
Flora Genoux(Buenos Aires, correspondante)

mercredi, mai 19, 2021

LA DROITE CHILIENNE REJETTE L’IMPÔT SUR LES SUPER RICHES

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PHOTO RADIO U DE CHILE

Santiago du Chili, 19 mai 2021. La Chambre des députés du Chili a rejeté hier un projet d’impôt sur les plus riches, représentant la première réaction en bloc de la droite après sa défaite aux élections du week-end dernier. 

par Prensa Latina 

INFOGRAPHIE  DIARIO FINANCIERO

Ce projet de loi présenté par le Parti communiste avec le soutien d’autres groupes, avait été approuvé le 21 avril par une large majorité à la Chambre, mais a dû être réexaminé par la commission de la Constitution après réception de quelques indications.

L’initiative prévoit une taxe unique de 2,5 pour cent sur le patrimoine net des personnes domiciliées ou résidant dans ce pays qui, au 31 décembre 2020, ont une fortune supérieure à 22 millions de dollars.

Ceci qui était au centre du texte législatif qui prévoit également une augmentation d’impôts pour les grandes entreprises, n’a pas obtenu les voix nécessaires (92) car la coalition Chile Vamos a voté contre, et n’a obtenu que 79 voix en faveur, 47 contre et 10 abstentions.

À présent, l’initiative ira au Sénat sans cet aspect fondamental, uniquement en envisageant une réduction de la taxe à la valeur ajoutée (TVA) sur certains produits essentiels, ce qui a été soutenu par les députés de droite.

Ce dénouement a suscité des réactions immédiates et la législatrice communiste Camila Vallejo, promotrice du projet, a assuré que les parlementaires de droite ne sont intéressés que par la défense des intérêts des millionnaires qui se sont enrichis encore davantage au milieu de la crise sanitaire.

La députée Alejandra Sepúlveda, membre de la Fédération régionaliste et sociale, a déclaré que si les Chiliens ont du mal et que le gouvernement affirme ne pas avoir les ressources pour les soutenir, il rejette dans le même temps ce projet qui lui donnerait les fonds pour venir en aide à des millions de familles.

L’argent qui pourrait être collecté par l’impôt sur les super riches, environ six milliards de dollars, serait destiné à financer un revenu de base universel pendant plusieurs mois pour les familles, sujet qui est en pleine discussion avec le gouvernement.

Pour sa part, le législateur Raul Soto, du parti centriste Pour la démocratie, a déclaré que le président Sebastián Piñera et sa coalition 'creusent leur propre tombe'.

«Ils n’ont pas compris le message des citoyens lors des élections du week-end (dernier), qui vise à mettre fin aux inégalités sociales et à progresser vers une plus grande justice fiscale et sociale », a-t-il manifesté. peo/mem/rc

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mardi, mai 18, 2021

L'OPPOSITION ET LES INDÉPENDANTS GAGNENT ET LE PARTI AU POUVOIR SOMBRE AU CHILI

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DANIEL JADUE ET IRACÍ HASSLER «LA REINE DES ABEILLES»
Santiago du Chili, 17 mai 2021. Les partis de droite ont été sévèrement battus lors des méga-élections de ce week-end au Chili, dans lesquelles les indépendants et les partis de gauche ont obtenu des victoires retentissantes.

Prensa Latina

IMAGE DE SOUTIEN À KARINA OLIVA
Lors de la très importante élection des Constituants, la droite, qui s'est présentée avec une liste unie, est loin d'avoir remporté un tiers des 155 sièges de la Convention constitutionnelle, comme l'indiquaient les enquêtes préélectorales.

Ce résultat ouvre des possibilités pour que la nouvelle Constitution puisse incarner les changements profonds exigés par des millions de Chiliens dans la rue après le soulèvement social du 18 octobre 2019.

Mais d'autres résultats auxquels les analystes ont été attentifs marquent également des transformations substantielles dans le panorama politique du pays.

En ce sens, la région de Valparaíso, la deuxième plus importante du pays, est devenue un bastion de la gauche, lorsque Rodrigo Mundaca, un leader social de premier plan, a été élu gouverneur avec une large marge.

Outre Mundaca, Jorge Charp, du Frente Amplio (Front uni de la gauche), a été réélu maire de Valparaíso, tandis qu'à Villa del Mar, domaine traditionnel de la droite, cette force a également remporté la mairie avec Makarena Rivamontes.

Dans la capitale, comme prévu, le candidat du Parti communiste à la présidence, Damiel Jadue, a été réélu maire avec plus de 64 % des voix, ce qui, selon les analystes, constitue un soutien solide à ses aspirations présidentielles.

Mais plus notable encore est la défaite du parti au pouvoir dans la Région Métropolitaine, dont il dominait traditionnellement l’intendance, puisque le poste de gouverneur sera disputé au second tour par Claudio Orrego, de la démocratie-chrétienne, et Karina Oliva, de Comunes, soutenue par les communistes et le Frente Amplio.

En outre, les grands gagnants de la soirée à de nombreux postes ont été les candidats indépendants, auxquels les analystes politiques ne donnaient que très peu de chances et qui, au contraire, ont gagné une place non négligeable parmi les constituants, les gouverneurs et les maires du pays. peo/jcc/mem/rc

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lundi, mai 17, 2021

« APRÈS LE VOTE DE CE WEEK-END, LE PAYSAGE POLITIQUE EST COMPLÈTEMENT REMODELÉ AU CHILI »

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DES CANDIDATS ET DES ÉLUS DE LA COALITION
POLITIQUE « CHILI DIGNE, VERT ET SOUVERAIN »

Les Chiliennes et les Chiliens votaient ce week-end pour désigner les rédactrices et les rédacteurs de la nouvelle Loi fondamentale, la Constitution héritée de la dictature militaire d’Augusto Pinochet. Les partis de gauche, mais surtout le parti des indépendants, sont les grands gagnants de ce scrutin. Analyse avec Christophe Ventura.

Entretien par Pablo Vivien-Pillaud

Christophe Ventura est directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).

Regards. Pourquoi ce vote ? Qu’est-ce qui a fait que le droite au pouvoir qui défendait le système actuel, a lancé un tel vote ?

Christophe Ventura. 

Ce vote avait pour objectif l’élection d’une Convention constitutionnelle - qui est le terme juridique de cette Assemblée constituante. Elle aura pour fonction de rédiger une nouvelle proposition de Constitution à partir du mois de juin 2021 pendant neuf mois qui pourront être prolongés de trois. Il sera ensuite proposé aux Chiliens et aux Chiliennes une nouvelle Loi fondamentale.

Cette élection qui s’est tenue les 15 et 16 mai est le fruit d’un processus non-voulu et anticipé par le gouvernement mais auquel il s’est résolu : c’est une concession qu’il a faite au mouvement social historique de l’hiver 2019 et qui avait mis dans la rue des millions de personnes, du jamais vu au Chili. Une de ses revendications était de passer par la voie de la souveraineté populaire chilienne pour modifier les règles fondamentales du pays en vu notamment, du point du mouvement social, d’améliorer les droits sociaux. Le gouvernement de l’époque, emmené par Sebastián Piñera, avait cédé sur ce processus car il avait fait l’analyse que ce mouvement était trop fort et qu’il allait la déborder mais en espérant le contrôler et y conserver une majorité de la droite et de l’extrême droite. Mais tout cela a été déjoué par le vote de ce week-end.

Les candidats indépendants qui avaient été à l’origine du mouvement d’octobre 2019 pour réclamer une société plus égalitaire sont les grands gagnants du scrutin du week-end Mais est-ce qu’ils sont pour autant devenus une vraie force politique ?

C’est une question qui reste ouverte et qu’on ne peut encore trancher aujourd’hui. Le phénomène de l’élection, c’est que le centre-droit, la droite et l’extrême-droite ont subi une lourde défaite avec à peine 37 sièges, c’est-à-dire même pas la minorité de blocage qu’ils espéraient avoir pour contrôler le processus des débats sur la prochaine constituante. La coalition traditionnelle du centre-gauche qui a été au gouvernement pendant ce qu’on appelle la Concertación en sort aussi assez affaiblie : seulement 25 constituants. Elle est débordée largement par la gauche alternative chilienne, la gauche de transformation, composée du Front élargi et du Parti communiste chilien, avec 28 sièges. Enfin, c’est surtout des listes de candidats indépendants de tout parti dont plusieurs sont issus du mouvement social de 2019 qui obtiennent tout le reste des sièges.

Il faut rappeler que le vote n’a pas été très important puisqu’il n’y a eu moins de 39% de participation - moins que les 51% d’octobre 2020 qui avaient ouvert ce processus constituant. Plusieurs raisons : la pandémie qui repart de plus belle au Chili malgré la vaccination mais surtout l’abstention des classes populaires et des villes pauvres. Il n’en demeure pas moins que, dans ce contexte-là, les candidats dits indépendants dont le chemin était semé d’embûches et malgré trois listes distinctes, ont réussi à avoir une majorité de sièges dans la Convention constitutionnelle. A noter l’excellent score de la Liste du peuple, qui est assez directement héritière du mouvement social, avec 24 sièges.

On peut dire que le paysage politique est remodelé au Chili avec l’arrivée d’éléments qui rejettent les partis traditionnels. Ils ne seront pas des alliés naturels des partis de gauche même si leurs aspirations résonnent avec celles de la gauche. Ils ne seront pas une force politique cohérente a priori. Il s’agit plutôt d’un agglomérat de secteurs militants divers et variés sur les questions sociales, de discriminations, de genre… mais ils n’ont pas de direction à proprement parlé et encore moins de leader. Ils se confronteront au délicat et incontournable jeu des alliances.

Une maire communiste va diriger la capitale, Santiago de Chile. Elle s’appelle Irací Hassler. Le Parti communiste n’est pas vraiment un parti nouveau sur la scène politique. Qu’est-ce que cela veut dire pour toi ?

L’élection de la Convention constitutionnelle était adossée à d’autres élections prévues avant le plébiscite d’octobre 2020, notamment des élections locales et régionales. Là aussi, le paysage est complexe mais montre une poussée indéniable de la gauche et des forces progressistes. C’est historique : la capitale, Santiago va être dirigée par une militante féministe qui s’appelle Irací Hassler et qui est membre du Parti communiste. De même, le nouveau gouverneur de Valparaíso, Rodrigo Mundaca, est un militant très connu des mouvements sociaux qui milite en faveur de l’égalité dans l’accès à l’eau au Chili - autre sujet lié à la Constitution - et qui avait reçu le Prix Danielle Mitterrand en France pour ce combat.

D’une manière générale, les candidats issus du centre-gauche ou de la gauche de transformation obtiennent beaucoup de victoires au détriment de la droite et de l’extrême droite qui avaient fait alliance. Ce n’était pas complètement inattendu puisque Sebastián Piñera, depuis le mouvement social de 2019, est devenu un président très impopulaire avec à peine 6% des Chiliens qui lui accordent leur confiance. Il a déclaré que ces résultats montrait que son gouvernement n’était pas en accord avec les demandes citoyennes et qu’il était confronté à de nouveaux leaderships. Et c’est totalement lucide !

Un dernier mot sur le Parti communiste chilien qui remportent des victoires importantes. D’abord, le PCCh a su renouveler sa direction avec une nouvelle génération qui portent les aspirations des mouvements sociaux actuels au Chili dont ils ont été parties prenantes. Ils ont aussi refusé d’apporter leur soutien à l’accord politique national des partis proposé par le gouvernement lorsque le mouvement social grondait au plus fort. Enfin, il faut surtout noter que ce que propose le PCCh a des échos très puissants avec le mouvement social et que c’est sûrement ça avant tout qui a porté ses fruits.

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