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Chili : une loi sur la légitime défense des policiers fortement critiquée Les forces de l’ordre du Chili jouiront désormais d’une « présomption de légitime défense » en cas d’usage d’arme à feu, selon un projet de loi adopté mercredi 5 avril par le Parlement. Dans un contexte de montée de l’insécurité, l’ONU s’inquiète de son impact sur le respect des droits de l’homme.
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Adoptée par le Parlement chilien le 5 avril 2023, une nouvelle loi octroie aux « carabiniers » – terme qui désigne des forces de l’ordre au Chili – la présomption de légitime défense en cas d’usage d’une arme à feu.
Seule une enquête pourra lever cette protection juridique. L’opposition de droite a porté ce texte, soutenue par une partie de la gauche et du centre. Surnommée « loi de la gâchette facile » par ses détracteurs, sa véritable appellation n’est pas moins anodine : loi Naín-Retamal, des noms de deux carabiniers tués dans l’exercice de leurs fonctions en 2020 et 2022. Comme l’indique le média chilien Cooperativa, il s’agit d’une fusion du projet de loi Naín, qui alourdit les peines pour les délits commis contre des carabiniers, et de la loi Retamal, qui renforce la légitime défense.
« Un grave recul en matière de droits humains »
Dans un communiqué du 30 mars, Amnesty International alerte sur le risque d’une probable augmentation des violences policières et de « l’impunité » qu’introduira l’adoption de ce nouveau texte. Rodrigo Bustos, directeur d’Amnesty International Chili, dénonce un « grave recul en matière de droits humains », et une réponse « opportuniste » face à la montée de l’insécurité dans le pays. Les homicides y ont augmenté de 65 % depuis 2010, selon le ministère de l’intérieur. L’ONG s’inquiète quant au respect du principe d’usage proportionné de la force.
L’ONU a également réagi face à la loi Naín-Retamal. Dans un tweet, le représentant aux droits de l’homme en Amérique du Sud, Jan Jarab, a appelé les autorités à « modifier certains aspects » du projet de loi, afin qu’il soit conforme à ses « obligations en matière de droit de l’homme ».
#Chile🇨🇱@ONU_derechos pidió hoy a las autoridades modificar aspectos de un proyecto de ley sobre protección de policías que se discute en @Senado_Chile, para armonizarlo con sus obligaciones internacionales de #DerechosHumanos.— ONU Derechos Humanos - América del Sur (@ONU_derechos) March 31, 2023
Hausse des homicides de 33 %
Au Chili, les homicides ont augmenté de 33 % en 2022 par rapport à l’année précédente, selon un organe de prévention de la criminalité du gouvernement. La délinquance est devenue la principale préoccupation de la population, indiquent plusieurs sondages récents, et le gouvernement de coalition des gauches de Gabriel Boric ne semble pas en mesure de trouver la solution pour enrayer cette hausse.
« Cette loi marque un nouveau climat politique, avec une question sécuritaire de plus en plus centrale », analyse Christophe Ventura, directeur de recherches à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), et auteur de Géopolitique de l’Amérique latine (Eyrolles). La droite chilienne, solidement implantée localement, se « constitue une base électorale sur ces thématiques (sécuritaires) », ajoute-t-il.
« Base arrière » du narcotrafic
Selon Christophe Ventura, on assiste plus globalement à une « mexicanisation » de l’Amérique latine. Les phénomènes de criminalité et de narcotrafic ne se cantonnent plus à l’Amérique centrale, ils s’étendent vers le Sud. Le Chili, en particulier, est devenu une « base arrière » pour les cartels qui se sont, depuis quelques années, délocalisés et régionalisés.
Élu en mars 2022, le gouvernement Boric a été fragilisé dès septembre de la même année par le rejet de sa proposition de nouvelle Constitution. L’adoption de la loi sur la présomption de légitime défense, portée par l’opposition de droite, vient sanctionner la difficulté du gouvernement à faire appliquer sa politique sociale face à la problématique de la montée de l’insécurité.
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