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Chili: des fouilles au cerro Chena pour retrouver des traces de victimes de la dictature militaire / Au Chili, la mémoire de la dictature d’Augusto Pinochet reste vivace. Entre le 11 septembre 1973 et le 11 mars 1990, les chiffres officiels recensent 28 459 victimes de torture, 2 125 morts et 1 102 détenus toujours portés disparus. Parmi eux, certains ont été vus pour la dernière fois sur le cerro Chena, à 25 kilomètres au sud du centre de Santiago. Des fouilles ont commencé le lundi 5 mai, pour, peut-être, retrouver leurs traces. [Où sont-ils ?]
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RFI
RFI avec notre correspondante à Santiago, Marion Bellal Publié le : 17/05/2025
4 min
les familles de disparus, le service médico-légal, la police d’investigation chilienne… Tous sont rassemblés devant une plate-bande terreuse, délimitée par un fil jaune. L'ambiance est détendue : quelques échanges souriants, quelques oiseaux chantent… jusqu’aux premiers coups de pelleteuse.
► À penser en dessin : FENÊTRE SUR COUR
C’est ici, sur le cerro (mont) Chena [ensemble de collines], qu’un nombre indéterminé de personnes ont été torturées il y a cinquante-deux ans, dans un bâtiment bas, d’une cinquantaine de mètres de long, désormais à l’abandon. Peut-être que certains détenus ont été fusillés à proximité, peut-être même une centaine.
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DES FOUILLES HISTORIQUES COMMENCENT DANS LA CASERNE MILITAIRE DE CERRO CHENA À LA RECHERCHE DE PERSONNES DISPARUES DE LA DICTATURE PHOTO PIENSA PRENSA TV |
José Miguel Gúzman est directeur d’une association de santé mentale qui accompagne les victimes de la dictature chilienne et leurs proches. Il salue la persévérance des familles pour que justice soit enfin faite. « La sortie de la dictature dans notre pays a résulté d’un accord. Il y a eu une négociation politique. Donc c’est vrai qu’à plusieurs reprises, les familles concernées ont pu avoir la sensation qu’il n’y avait pas de véritable volonté politique à faire justice. »
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DES FOUILLES HISTORIQUES COMMENCENT DANS LA CASERNE MILITAIRE DE CERRO CHENA À LA RECHERCHE DE PERSONNES DISPARUES DE LA DICTATURE PHOTO PIENSA PRENSA TV |
Monica Monsalves León regarde les archéologues travailler avec une émotion palpable. Son père, Adiel Monsalves Martinez, un travailleur ferroviaire syndiqué, a été séquestré ici à partir du 28 septembre 1973. Et des témoins affirment qu’il y a été fusillé le 6 octobre. Pour Monica, qui avait trois ans et demi au moment des faits, la journée est historique, même si elle arrive bien trop tard. « La justice a avancé lentement. Nous, on dit que la justice, quand elle tarde, elle ne peut plus être appelée justice. Parce que ces dernières années, de 2010 à aujourd’hui, il y a effectivement eu des investigations, des avancées, des procès, des condamnations. Mais ces condamnations arrivent quand les criminels génocidaires ont déjà atteint un âge très avancé ; ce sont de vieilles personnes qui ont des maladies propres à la vieillesse… Et beaucoup d’entre eux sont morts. Concernant le mont Chena, il n’y a aucun génocidaire qui a été condamné pour ces crimes. »
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DES FOUILLES HISTORIQUES COMMENCENT DANS LA CASERNE MILITAIRE DE CERRO CHENA À LA RECHERCHE DE PERSONNES DISPARUES DE LA DICTATURE PHOTO PIENSA PRENSA TV |
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DES PORTRAITS DE PERSONNES DISPARUES PENDANT LA DICTATURE DE PINOCHET PROJETÉS SUR LA FAÇADE DU PALAIS PRÉSIDENTIEL DE LA MONEDA À SANTIAGO DU CHILI, LE 30 AOÛT 2023 AFP |
À la recherche de « stigmates »
Ces derniers mois, un radar à pénétration de sol a parcouru les 1 200 hectares de la colline. Les anomalies de terrain détectées pourraient bien cacher le cimetière clandestin dont les survivants et les familles soupçonnent l’existence. Mais Monica connaît les limites de ces recherches : en 1978, le régime dictatorial a ordonné d’exhumer tous les corps enterrés clandestinement pour effacer les preuves. « Ils les ont fait disparaître une seconde fois. Donc ce qu’on espère trouver maintenant, dans cette enceinte militaire, où ont été amenés les prisonniers disparus, ce sont des stigmates. Des petites traces. Des fragments osseux. Pendant toutes ces années, nous avons lutté dans l’espoir de retrouver leur empreinte.»
La ministre Marianela Cifuentes, sous-secrétaire aux Droits humains, l’assure : politiques et familles sont désormais sur la même longueur d’ondes. « Le fait qu’on cherche, n’est-ce pas, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucune question en suspens, dans le fond, c’est un message pour l’avenir. Pour que ce genre d’actions ne se répètent pas. »
L’excavation réalisée par la pelleteuse s’intensifie. Chaque gramme de terre est ensuite passé au tamis, et ce qui ne traverse pas le treillage sera envoyé au service médico-légal pour examen. Les familles devront donc attendre encore plusieurs mois, avant d’obtenir les réponses tant espérées.
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