L'ATALAYA POLO CLUB A COMPTÉ LE CHE PARMI SES JOUEURS, AU DÉBUT DES ANNÉES 1950 |
Parmi les nombreuses histoires qui circulent au sujet du mythique Che Guevara, son extraordinaire passion pour le rugby devrait en étonner plus d’un. Le ballon ovale lui a appris en outre à mieux supporter les difficultés liées à son asthme. Certains vont même jusqu’à dire qu’il lui a permis de trouver des solutions dans sa vie de révolutionnaire. “Ce qui a déterminé une grande partie de notre vie, ce fut l’asthme terrible d’Ernesto. Je me rappelle le jour où il a eu sa première crise et où nous avons découvert son mal. Il avait 2 ans. C’était le 2 mai 1930. Pendant les deux années qui ont suivi, on lui a fait prendre tous les traitements possibles et imaginables.
Enfin, le médecin nous a recommandé l’endroit le plus indiqué pour Ernestito : Alta Gracia, dans les environs de Córdoba”, se souvient son père, Ernesto Guevara Lynch. C’est dans cette province que le Che a découvert le rugby. Il a d’abord essayé de faire des randonnées pédestres, interminables et épuisantes. Il a aussi pratiqué la natation et le football, même si, dans ce dernier sport, il jouait toujours au poste de gardien, l’inhalateur à la main. Jusqu’au jour où il a dit à Alberto Granado, un ami de toujours, qu’il voulait jouer au rugby.
“Ernesto est venu avec moi à Estudiantes de Córdoba, qui était un rejeton d’El Tala, un club plus ancien et traditionnel. J’y jouais avec mes frères et j’étais l’entraîneur de deuxième division. En septembre ou octobre 1942, nous avons commencé les tests. Ernesto avait de l’asthme et les gens avaient peur qu’il joue parce que plusieurs fois il nous avait fait une crise au milieu du terrain. Mais, comme moi aussi j’avais subi une discrimination du fait que j’étais maigre et court sur pattes, je lui ai dit : ‘Je vais t’apprendre.’ Et il a appris”, rapporte Alberto Granado. Guevara n’a pas tardé à sortir du lot par la férocité de ses plaquages. Ce demi de mêlée s’est vu affubler d’un nouveau surnom par ses camarades : Fúser, la forme abrégée de Furibundo Serna [Serna le furibond – Serna étant le nom de jeune fille de sa mère, à qui il devait sa combativité face à la maladie]. C’est à ce moment qu’est née la légende du Che entrant sur le terrain l’inhalateur à la main, laissant celui-ci sur un banc et quittant le terrain de temps en temps pour en prendre une bouffée.
Quand la famille Guevara s’est installée à Buenos Aires, Ernesto s’est inscrit au San Isidro Club (SIC) pour garder le contact avec le rugby. “Les médecins m’avaient dit que ce sport était pour mon fils presque du suicide, que son cœur ne pourrait pas le supporter. Un jour, je le lui ai dit et il m’a répondu : ‘Papa, j’aime le rugby et, même si je dois en crever, je vais continuer à le pratiquer.’ Face à un tel entêtement, j’ai décidé de recourir à d’autres méthodes. Mon beau-frère Martínez Castro était président du SIC et je lui ai demandé de faire sortir Ernesto de l’équipe où il jouait”, raconte son père.
C’était un demi de mêlée qui ne ménageait pas ses efforts
D’après la plupart des témoignages, le Che, écœuré de son exclusion, serait parti pour l’Atalaya, un autre club de la région de San Isidro. A Atalaya, le journaliste Diego Bonadeo jure avoir été l’un des gamins qui couraient le long de la touche pour tendre l’inhalateur au Che, qui de temps en temps sortait du terrain pour reprendre son souffle. Lors de son passage à Atalaya, le Che a reçu encore un nouveau surnom : Chancho [cochon]. Il le devait à son nez retroussé et aussi à la férocité de son jeu, même si on ne l’a jamais vu mener une action qui aurait pu disqualifier son équipe. Pablo Pirán, neveu du Che, se rappelle une autre activité que pratiquait Guevara. “Il aimait tellement le rugby qu’il a commencé à éditer la première revue sur ce sport. Elle s’intitulait Tackle [Plaquage]. Il y publiait des commentaires sous le pseudonyme de Chancho”, se souvient-il.
Mais, à force d’entendre dire que son surnom ne faisait pas sérieux, le Che finit par le troquer contre Chang-Cho, comme s’il s’agissait d’un nom chinois. Pour la plupart des gens, il était demi de mêlée, même si là encore Diego Bonadeo est d’un autre avis : “Il était plutôt trois-quarts centre.”
En 1951, le Che a quitté l’Argentine, et c’est une autre histoire qui a commencé. “Un jour, pendant des jeux interuniversitaires, j’ai entendu un dialogue que je n’oublierai jamais. La sélection de rugby de la faculté de médecine [le Che se destinait à devenir médecin] devait jouer. Un type a demandé pourquoi Guevara ne jouait pas, et un autre lui a répondu : ‘Il fait une révolution au Panamá’”, rapporte Diego Bonadeo.
Jorge Búsico
Rugby Mundial
Quand la famille Guevara s’est installée à Buenos Aires, Ernesto s’est inscrit au San Isidro Club (SIC) pour garder le contact avec le rugby. “Les médecins m’avaient dit que ce sport était pour mon fils presque du suicide, que son cœur ne pourrait pas le supporter. Un jour, je le lui ai dit et il m’a répondu : ‘Papa, j’aime le rugby et, même si je dois en crever, je vais continuer à le pratiquer.’ Face à un tel entêtement, j’ai décidé de recourir à d’autres méthodes. Mon beau-frère Martínez Castro était président du SIC et je lui ai demandé de faire sortir Ernesto de l’équipe où il jouait”, raconte son père.
C’était un demi de mêlée qui ne ménageait pas ses efforts
D’après la plupart des témoignages, le Che, écœuré de son exclusion, serait parti pour l’Atalaya, un autre club de la région de San Isidro. A Atalaya, le journaliste Diego Bonadeo jure avoir été l’un des gamins qui couraient le long de la touche pour tendre l’inhalateur au Che, qui de temps en temps sortait du terrain pour reprendre son souffle. Lors de son passage à Atalaya, le Che a reçu encore un nouveau surnom : Chancho [cochon]. Il le devait à son nez retroussé et aussi à la férocité de son jeu, même si on ne l’a jamais vu mener une action qui aurait pu disqualifier son équipe. Pablo Pirán, neveu du Che, se rappelle une autre activité que pratiquait Guevara. “Il aimait tellement le rugby qu’il a commencé à éditer la première revue sur ce sport. Elle s’intitulait Tackle [Plaquage]. Il y publiait des commentaires sous le pseudonyme de Chancho”, se souvient-il.
Mais, à force d’entendre dire que son surnom ne faisait pas sérieux, le Che finit par le troquer contre Chang-Cho, comme s’il s’agissait d’un nom chinois. Pour la plupart des gens, il était demi de mêlée, même si là encore Diego Bonadeo est d’un autre avis : “Il était plutôt trois-quarts centre.”
En 1951, le Che a quitté l’Argentine, et c’est une autre histoire qui a commencé. “Un jour, pendant des jeux interuniversitaires, j’ai entendu un dialogue que je n’oublierai jamais. La sélection de rugby de la faculté de médecine [le Che se destinait à devenir médecin] devait jouer. Un type a demandé pourquoi Guevara ne jouait pas, et un autre lui a répondu : ‘Il fait une révolution au Panamá’”, rapporte Diego Bonadeo.
Jorge Búsico
Rugby Mundial