Maladie de Castro et Infarctus de Pinochet: Amalgame, mensonge et désinformation
Le général Pinochet a été hospitalisé au Chili à la suite d’une attaque cardiaque. Le dirigeant cubain Fidel Castro, toujours malade, n’a pas pu assister aux cérémonies marquant le cinquantième anniversaire du début de la lutte menée contre le régime de Batista. Ces deux faits, indépendants, ont néanmoins suffi à certains médias pour opérer un rapprochement abusif entre les deux hommes; systématiquement, leurs noms sont associés pour présenter leur bulletin de santé et le même mot de «dictateur» est employé pour les désigner.
Pour tous ces commentateurs, qui se proclament «indépendants», il n’y aurait donc aucune différence entre ce militaire arrivé au pouvoir grâce à un putsch... et à la CIA, en massacrant des milliers de travailleurs chiliens, et un homme qui, s’appuyant sur la population cubaine, renversa une dictature pourrie et tint tête à toutes les tentatives de l’impérialisme américain de remettre Cuba au pas.
Pinochet renversa le gouvernement de gauche de Salvador Allende par un coup d’État militaire, le 11 septembre 1973. Dans les jours qui suivirent, les militants d’organisations ouvrières et paysannes, et plus largement les partisans du précédent régime, furent systématiquement traqués, emprisonnés ou parqués dans les stades, torturés, assassinés. La répression fit des milliers de morts. À cela s’ajouta l’interdiction des partis de gauche, la dissolution des syndicats, le licenciement de 300000 travailleurs, une surexploitation accrue des salariés qui subirent une réduction de 40% de leur pouvoir d’achat.
Castro était arrivé au pouvoir, début 1959, à la tête d’un soulèvement populaire qui mit fin à la dictature de Batista, dirigeant corrompu, haï par la population, qui pillait les caisses de l’État en maintenant le peuple cubain dans la misère. Le principal crime de Castro, aux yeux de l’impérialisme américain, c’est d’avoir mis en œuvre une série de réformes, dont la réforme agraire qui permit de donner des terres à des dizaines de milliers de paysans, d’avoir résisté à ses pressions puis, devant l’embargo décidé par les États-Unis, de s’être adressé à l’URSS. Et ce que les anticastristes très primaires oublient de dire, c’est que le régime castriste développa l’éducation et la santé, à tel point que des médecins cubains exercent dans des pays des Caraïbes ou d’Amérique latine, permettant ainsi aux plus pauvres d’avoir accès aux soins.
Ce régime est certes loin d’être un modèle de démocratie. La presse est contrôlée et, selon les chiffres avancés en juin 2006 par l’Union européenne, 330 opposants au régime seraient en prison. On est loin de toutes les rumeurs propagées à ce propos! Sous cet aspect, le régime cubain est effectivement une dictature. Mais il ne l’est pas plus que nombre de pays pauvres, pourtant qualifiés de «démocraties» dès lors que leurs dirigeants protègent les intérêts des puissances impérialistes. Et c’est sans commune mesure avec la répression qui suivit le coup d’État de Pinochet, et vis-à-vis de laquelle les dirigeants occidentaux furent très compréhensifs. De la situation politique de Cuba, les dirigeants de l’impérialisme américain portent d’ailleurs une lourde responsabilité, en imposant un embargo depuis plus de quarante ans avec les difficultés économiques que cela ne manque pas d’entraîner. Et ceux qui aujourd’hui mettent sur le même pied Castro et Pinochet montrent qu’ils sont d’une ignorance crasse, ou qu’ils se font les porte-parole de l’ordre établi, celui des puissants... ce qui n’est pas incompatible.