(De Santiago) Par Thomas Huchon (Journaliste)
Après de nombreux atermoiements, la cour suprême chilienne a décidé d'autoriser l'extradition d'Alberto Fujimori vers le Pérou afin d'y être jugé pour corruption et violation des droits de l'homme. C'est l'épilogue d'une saga de 22 mois durant laquelle l'ancien Président péruvien a tout tenté pour se soustraire à la justice, y compris de se présenter au Sénat japonais. Il devrait être "envoyé" vers le Pérou sous 24 heures, selon le gouvernement chilien, soit par voie aérienne, soit par voie maritime.
La Présidente Michelle Bachelet a refusé de commenter la décision judiciaire, se déclarant simplement "satisfaite que la justice ait pu faire son travail tranquillement". Mais elle a tenu à rappeler que cette décision "n'était pas une condamnation, mais un accord pour une extradition. C'est à la justice péruvienne qu'il appartient de juger Fujimori".
Ce dernier s'est exprimé sur une radio péruvienne peu de temps après avoir eu connaissance de la nouvelle: "Je vais faire face aux accusations, et je sortirai blanchi. Pour moi, le Chili était une étape nécessaire à mon retour au Pérou. J'avais besoin de passer devant la justice chilienne pour qu'elle fasse diminuer le nombre de procès à mon encontre. J'espérai que l'on passerai de 12 à 4 procès, ce sera finalement 7. Comme je l'ai déjà dit, c'est l'opportunité de rentrer, et de me retrouver avec le peuple, ce qui a toujours été mon objectif".
L'ONG Human Rights Watch a, elle, salué la décision des magistrats chiliens, la qualifiant de "sans précédent". "C'est la première fois qu'un ancien chef d'Etat est extradé vers son pays pour y être jugé", a expliqué aux médias locaux José Miguel Vivanco, directeur de l'antenne chilienne de l'ONG. "Au vu de l'histoire chilienne, c'est aussi un élément important. Après des années de lutte contre Pinochet, le Chili pose de nouvelles bases en matière de droits de l'Homme et de justice", a-t-il ajouté.
Car si les juges de la Cour suprême ont pris leur temps pour se décider, ils ont au final considéré que les preuves étaient suffisantes pour valider la procédure d'extradition de Fujimori dans 7 des affaires auxquelles il est lié. Cinq concernent des pratiques de corruption, les deux autres étant des procès pour violation des droits de l'Homme. Il sera ainsi jugé comme coauteur du massacre de Barrios Altos (assassinat de 15 personnes, dont un enfant de 8 ans) et comme responsable de celui de La Cantuta (9 morts). Par contre, "el Chino" ne pourra pas être jugé pour les autres crimes qui lui sont imputés, ces derniers n'ayant pas été validés par la justice chilienne.