mardi, décembre 22, 2020

LA RUDE PÊCHE ARTISANALE DES LAFKENCHES, DANS LE SUD DU CHILI

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PHOTO GETTY IMAGES / AFP / MARIO QUILODRAN

Ils bravent pendant des heures les eaux glacées du Pacifique pour en extraire de lourdes algues. Les Lafkenches, des Autochtones du sud du Chili, perpétuent cette récolte artisanale pour obtenir quelques revenus supplémentaires.

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LAFKENCHES, DANS LE SUD DU CHILI»
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Radio Canada avec l'AFP

J'ai commencé à l'âge de 10 ans à ramasser algues et coquillages, raconte Lidia Caniulen, 50 ans, qui réside sur la commune de Carahue, où vivent 1120 Lafkenches.

Dans son quartier de Los Arrayanes, 90 % des 40 familles se consacrent à cette pêche artisanale.

Les Lafkenches font partie du peuple mapuche, communauté autochtone majoritaire au Chili et surtout présente dans la province d'Araucanie, à 800 kilomètres au sud de Santiago.

Lafkenches signifie gens de la mer ou gens de la côte en mapundungu, la langue mapuche.

Une femme et un enfant sur une plage de sable gris.

PHOTO MARIO QUILODRAN / AFP

Rares sont désormais les familles lafkenches qui perpétuent le mode de vie traditionnel basé sur une petite agriculture et la cueillette de différentes algues locales. Parmi ces dernières figure le cochayuyo, une algue tubulaire qui peut atteindre 15 mètres de long, ou encore la luche, une algue rouge.

Lidia Caniulen raconte que ses parents lui ont enseigné comment interpréter le moment où la lune annonce une petite mer pour profiter de la marée basse et améliorer la récolte.

Une récolte difficile

Alors que personne ne supporterait de passer cinq minutes dans l'eau glacée, les Lafkenches, parfois en combinaison thermique, passent des heures à combattre les vagues pour ramasser les épais filaments du « cochayuyo », cette algue vert foncé, riche en iode et typique des mers subantarctiques.

Quand je vais dans l'eau juste comme ça, sans combinaison et pieds nus, il m'arrive d'y passer jusqu'à deux heures pour sortir le cochayuyo.

Lidia Caniulen

Le cochayuyo est comestible, c'est une algue bonne pour la santé, car elle contient beaucoup d'iode, c'est bon pour la thyroïde, explique-t-elle, soulignant que ces algues sont vendues en Chine et au Japon pour la confection de savons et de shampoings.

Avec plus de 4500 kilomètres de côtes, le Chili est un grand exportateur de produits de la mer. Chaque année, 6000 tonnes d'algues sont exportées en Asie pour des usages industriels, dans les secteurs des cosmétiques, de l'alimentation végane ou des compléments alimentaires.

Mais les familles qui pêchent artisanalement estiment que cette activité n'est pas si rentable vu l'effort déployé.

Un homme en combinaison retire des algues de la mer qui pousse de fortes vagues. 

PHOTO MARIO QUILODRAN

Nous n'avons pas d'argent pour acheter des fertilisants et des semences [pour cultiver] et les algues nous aident, raconte Lidia Caniulen qui peut obtenir 1,30 dollar pour un kilogramme d'algues.

Pour ramasser les locos, des mollusques typiques des côtes chiliennes et péruviennes, il faut passer plus de deux heures sous l'eau.

Ils sont au fond et c'est difficile de les ramasser, soutient Lidia qui peut espérer toutefois toucher 20 dollars pour une douzaine de coquillages.

Sur ses cinq enfants, seuls deux perpétuent la tradition.

C'est très dur, beaucoup de jeunes ne font plus ça, raconte la quinquagénaire qui dit comprendre ceux qui ne veulent plus braver les eaux traîtres et glacées.

Son fils Javier Epullan, 26 ans, est venu sur la plage d'El Salto, à 40 minutes de marche de Los Arrayanes, pour retirer des algues.

Ensuite, nous les coupons, nous attendons qu'elles jaunissent avec la rosée ou l'eau de pluie, pour pouvoir les emballer, explique-t-il.

Il faut avoir des bras et des mains solides, et de bonnes jambes pour arracher les énormes tiges de « cochayuyo » aux vagues, les traîner jusqu'au rivage, les mettre au soleil pour les faire sécher, rassembler les ballots et ensuite escalader le chemin de la falaise.

Le cochayuyo étendu sur des rochers.

PHOTO MARIO QUILODRAN
Jusqu'en 2015, les ballots étaient transportés à dos d'homme, mais le ministère de la Pêche et de l'Agriculture a fait don d'un élévateur à algues, ce qui a rendu le trajet moins éprouvant, explique Javier Epullan, à propos d'une tyrolienne installée à flanc de falaise.

Les ballots sont ensuite répartis en paquets pour la vente à des revendeurs dans la zone. Entre novembre et avril, 2000 à 3000 kilogrammes d'algues sont ainsi récoltés.

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