lundi, avril 12, 2021

INFOGRAPHIES. MALGRÉ UNE VACCINATION MASSIVE, LE CHILI SUBMERGÉ PAR LE COVID

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

PHOTO MARTIN BERNETTI / AFP
Face à une recrudescence des infections, le troisième pays le plus vacciné au monde a basculé dans le confinement, fin mars. Les patients en réanimation sont plus jeunes.

« - Ñ- PROPAGANDE ÉLECTORALE » 

[Cliquez sur la flèche pour visionner la vidéo]  

DOSES DE VACCIN COVID-19
ADMINISTRÉES POUR 100 PERSONNES,
11 AVRIL 2021
C'est le pays le plus avancé en Amérique latine pour la vaccination contre le Covid-19. Pourtant, il est loin d'avoir renoué avec une vie normale. Le Chili fait en effet face depuis plus d'un mois à une brutale recrudescence des infections. Face à cette situation, le gouvernement a dû imposer un nouveau confinement, strict, en vigueur depuis le 27 mars. 

Le ministre de la Santé, Enrique Paris, a reconnu que c'était une mesure "dure mais nécessaire" pour contrôler le virus, notamment dans la région métropolitaine de Santiago, la région la plus peuplée. Les indicateurs se dégradent, l'inquiétude est forte, et plus de jeunes que de personnes âgées sont désormais admis en réanimation. Comment ce pays de 19 millions d'habitants, avec l'une des meilleures couvertures vaccinales dans le monde pour la première dose, peut se retrouver aujourd'hui dans cette situation ? 

Un taux de vaccination élevé...

Cette situation semble paradoxale. Depuis des mois, les autorités sanitaires répètent que l'espoir d'une sortie de crise repose sur la vaccination. Et cela se confirme dans les faits, comme le montrent plusieurs exemples avec notamment Israël, qui a renoué avec une vie quasiment normale, et le Royaume-Uni, dans une moindre mesure, avec la réouverture des pubs et restaurants depuis ce lundi.  

Or, selon les données, le Chili est très bien placé. Voici le podium : Israël, en tête, affiche un taux de vaccination de plus de 60% ; en deuxième position, on retrouve le Royaume-Uni (47%) ; puis le Chili, avec un taux de vaccination de 38%. Plus de 7 millions de personnes ont reçu au moins une première dose. Et plus de trois millions ont reçu les deux précieuses injections. Rappelons qu'en France, le taux de vaccination n'est encore que de 14%.


... Mais des records de contaminations 

CAPTURE D'ÉCRAN
Pourquoi le virus sème-t-il encore le chaos ? La présence de nouveaux variants du virus, le relâchement de la population face à la progression rapide de la vaccination et la fin des grandes vacances dans l'été austral ont contribué à l'augmentation des infections, selon les experts. Vendredi dernier, 9151 cas ont été enregistrés en 24 heures, un record en plus de dix mois. Sur une semaine glissante - afin de lisser les variations -, on voit que l'indicateur est au plus haut depuis le début de la pandémie.  

CAPTURE D'ÉCRAN
Au total, le pays a enregistré plus d'un million de cas déclarés, dont 24 346 mortels, selon le site Our World in Data. Après une phase de décrue, les décès n'ont fait qu'augmenter depuis le mois de décembre, avec une forte poussée à la fin mars. 

CAPTURE D'ÉCRAN
Toujours en cette période, fin mars, les autorités ont confirmé qu'après le variant britannique, "45 cas du variant brésilien" avaient été identifiés. Ce variant P.1, une mutation beaucoup plus virulente du SARS-CoV-2, est responsable d'une flambée épidémique au Brésil et dans plusieurs de ses voisins sud-américains. 

Autre explication : les autorités ont également souligné la faible efficacité vaccinale dans le pays après l'injection d'une seule dose. Essentiellement basée sur le vaccin chinois Coronavac (à 93%), elle a démontré une efficacité de 56,5% contre les infections deux semaines après l'injection de la deuxième dose, mais aucun effet significatif (à peine 3%) après la première, selon une étude rendue publique mardi dernier.  

Face à l'urgence sanitaire, le Chili a approuvé mercredi dernier l'utilisation en urgence du vaccin chinois CanSino Biologics (une seule dose). C'est le quatrième vaccin approuvé par le gouvernement. CanSino s'ajoutera aux vaccins Pfizer/BioNTech et Sinovac qui sont actuellement administrés. Egalement approuvé, le vaccin d'AstraZeneca n'est cependant pas encore disponible dans le pays. 

Des patients plus jeunes en réanimation

La vaccination et la hausse des infections "sont des phénomènes qui évoluent sur des voies totalement distinctes", a souligné fin mars à l'AFP Darwin Acuña, président de la Société chilienne de soins intensifs. La campagne de vaccination a débuté le 24 décembre, d'abord pour le personnel médical, puis à partir du 3 février pour la population, en commençant par les personnes les plus âgées ou exposées.  

"L'effet du vaccin pour la population la plus à risque n'a pas encore été observé, car la deuxième dose pour cette population à risque vient d'être administrée", a-t-il précisé. D'ici la mi-avril, on devrait "constater un effet réel sur les besoins en lits de réanimation" pour cette population et sur les chiffres de la mortalité. 

Comme dans d'autres pays, les médecins réanimateurs constatent des différences par rapport à la première vague, avec des patients plus jeunes et plus gravement atteints. Les patients de moins de 39 ans admis en soins intensifs au Chili sont désormais plus nombreux que ceux de plus de 70 ans, ont ainsi indiqué jeudi dernier les autorités sanitaires, notant un "changement radical". 

Quelle leçon pour la France ?

CAPTURE D'ÉCRAN
Cette situation au Chili ne remet nullement en cause l'utilité des vaccins. "Si au Chili ce sont surtout les jeunes qui sont hospitalisés et non plus les personnes âgées qui elles, sont vaccinées, c'est plutôt le signe que les vaccins utilisés au Chili sont efficaces. On voit cette tendance partout où l'on vaccine", a commenté sur Twitter l'épidémiologiste Antoine Flahault. 

Cela illustre également une autre réalité : face au Covid-19, il ne faut pas tout miser sur les injections. "Les vaccins vont probablement changer la donne, mais ne miser que sur eux représente un pari risqué qu'il serait peut-être prudent d'accompagner", explique le même Antoine Flahault dans un grand entretien pour L'Express. 

PHOTO FRANÇOIS GUENET / INSERM
Une autre leçon peut également être retenue dans la perspective d'un retour à une vie (presque) normale. "Bien sûr qu'on va pouvoir progressivement alléger les mesures. Mais si on les enlève complètement trop rapidement, on va se retrouver dans la situation d'un pays comme le Chili, qui a vacciné une grande proportion de sa population mais qui a relâché les mesures trop tôt et qui fait face à une vague pratiquement supérieure à celles qu'il avait connues jusque-là", soulignait fin mars l'épidémiologiste Dominique Costagliola auprès de l'AFP